Il s'agit du premier mouvement national de contestation contre le président d'extrême droite Jair Bolsonaro depuis son arrivée au pouvoir en janvier. Une contestation de masse, qui a aussi débordé le thème de l'éducation pour fustiger les piliers de sa politique: port d'arme et réforme des retraites.
La mobilisation, qui a touché les 27 Etats du Brésil et, selon la presse, 188 villes, a également été marquée par l'arrêt des cours dans des centaines d'établissements, publics et privés.
Les seuls chiffres fournis par la police ont fait état, en soirée, de 20.000 manifestants à Belem (nord) et 15.000 à Brasilia (centre-ouest).
Mais selon les organisateurs, 150.000 personnes ont manifesté à Sao Paulo (sud-est), 70.000 à Salvador (nord-est), 20.000 à Curitiba (sud) et 15.000 à Belo Horizonte (sud-est).
A Rio, des dizaines de milliers de personnes ont envahi le centre et les images aériennes des télévisions étaient impressionnantes, comme à Sao Paulo.
Ces centaines de milliers de manifestants répondaient à l'appel de leurs syndicats pour protester contre le gel de 30% des budgets des universités fédérales.
Depuis le Texas, où il devait recevoir un prix de la Chambre de commerce Etats-Unis-Brésil, le président Bolsonaro a vu dans les manifestants "quelques idiots utiles manipulés par une minorité experte qui compose le coeur des universités fédérales au Brésil". Des propos qui ont été accueillis avec colère sur les réseaux sociaux.
"Il n'y a pas de coupes. Le problème c'est que j'ai trouvé un Brésil détruit économiquement (en arrivant au pouvoir, ndlr)", a dit le président. "Le gel (des crédits) est inférieur aux prévisions", a-t-il assuré.
La présence policière a été très discrète toute la journée. En début de soirée, un autobus a été incendié à Rio de Janeiro et deux autres incidents avaient été rapportés, dans cette ville et à Porto Alegre, où la police a dispersé des manifestants avec des gaz lacrymogènes.
"Des livres oui, des armes non!" lisait-on sur les panneaux de manifestants, dont beaucoup de jeunes défilant en musique à Sao Paulo, en référence à la politique pro-armes de Jair Bolsonaro.
"La classe aujourd'hui est dans la rue", lisait-on sur des stands dressés par des manifestants à Rio. "Fora Bolsonaro!" ("Dehors Bolsonaro!") clamait une banderole. "Ou ils stoppent les coupes (budgétaires) ou on stoppe le Brésil", criaient des protestataires.
"Pas responsables"
L'annonce récente du gel de 30% des subventions aux universités fédérales par le nouveau ministre de l'Education, Abraham Weintraub, a mis le feu aux poudres dans un secteur déjà sinistré par le manque de moyens.
Le ministre avait d'abord annoncé cette mesure contre trois universités accusées d'agitation politique, avant de la généraliser.
Des recteurs sont montés au créneau, expliquant que ces coupes budgétaires menaçaient de paralysie les universités fédérales. L'annonce de la suspension du versement des bourses de master et doctorat en sciences et sciences humaines la semaine dernière a jeté de l'huile sur le feu.
A la Chambre des députés, le ministre de l'Education a dû s'expliquer mercredi sur ses mesures. "Nous ne sommes pas responsables du gel actuel", a-t-il affirmé, "le budget a été fait par les gouvernements précédents. Nous ne sommes absolument pas responsables du désastre de l'éducation de base au Brésil".
"Marxisme culturel"
Depuis l'arrivée au pouvoir de Jair Bolsonaro, l'enseignement a été le terrain privilégié de la chasse au "marxisme culturel" pour un gouvernement décidé à éliminer tout supposé endoctrinement gauchiste des élèves dans les salles de classe.
M. Weintraub avait déjà provoqué une polémique fin avril en évoquant une réduction des fonds publics alloués aux départements de philosophie et de sociologie des universités.
Le ministère de l'Education a été le théâtre depuis janvier de graves turbulences: luttes intestines, décisions erratiques et limogeage d'un premier ministre nommé avant M. Weintraub.
Encore sonnée par sa défaite dans les urnes contre Jair Bolsonaro en octobre 2018, la gauche espère relever la tête à la faveur du mouvement de contestation dans l'enseignement.
Plusieurs syndicats ont ainsi estimé que la journée de mercredi était une répétition générale avant la grève nationale contre l'impopulaire réforme des retraites à laquelle ils ont appelé pour le 14 juin.
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