Pour l'heure, le navire Bahri Yanbu reste ancré à une trentaine de kilomètres du port et "les conditions d'accueil techniques ne sont pas là. Il ne rentrera pas au port aujourd'hui" (jeudi), a indiqué une source portuaire à l'AFP.
L'Acat (Action des chrétiens pour l'abolition de la torture) et l'ONG Action Sécurité Ethique Républicaines (ASER) ont déposé des recours en urgence au tribunal administratif de Paris, qui devraient être examinés rapidement, pour empêcher le départ du Havre (Seine-Maritime) du cargo chargé d'armes.
"L'Etat français ne peut ignorer que ces armes peuvent servir à commettre des crimes de guerre au Yémen, où plus de 400.000 civils sont potentiellement sous le feu", a déclaré à l'AFP l'avocat de l'Acat, Joseph Breham.
Plusieurs autres organisations comme Human Rights Watch, Amnesty International ou l'Observatoire des armements sont également vent debout contre ces ventes.
Interrogé à son arrivée à Sibiu en Roumanie pour un sommet européen, Emmanuel Macron a été clair: "L'Arabie saoudite et les Emirats arabes unis sont des alliés de la France. Et ce sont des alliés dans la lutte contre le terrorisme. Nous l'assumons totalement", a-t-il affirmé.
"Il y a un comité qui gère ces exports, sous l'autorité du Premier ministre, dans lequel les choses d'ailleurs ont été durcies ces dernières années, et où nous demandons la garantie que ces armes ne puissent pas être utilisées contre des civils. Elle a été obtenue", a-t-il ajouté.
"A la frontière"
Prônant la "transparence", Emmanuel Macron a admis qu'il était "tout à fait vrai que la France, depuis plusieurs années - au plus fort il y a cinq, six ans, dans les contrats qui ont été faits à l'époque - a vendu des armes à la fois aux Emirats arabes unis et à l'Arabie saoudite".
"L'essentiel des armes qui ont été vendues sont plutôt utilisées à l'intérieur du territoire ou à la frontière", a-t-il reconnu.
S'il n'a pas précisé les armes qui devaient être chargées au Havre, le site d'investigation Disclose a avancé que le navire devait prendre livraison de "huit canons de type Caesar".
"Quelles garanties? Quand on vend des armes à un pays, il en fait ce qu'il veut", a contesté le député communiste Jean-Paul Lecoq, au cours d'un rassemblement qui a réuni une centaine de personnes sur le port du Havre pour dénoncer ces ventes d'armes à l'Arabie saoudite.
"Les canons ne sont pas faits pour décorer le palais du cheikh", a ironisé le parlementaire, parlant d'un "mensonge d'Etat".
Paris a invariablement affirmé que ces armements ne sont utilisés que de manière défensive et pas sur la ligne de front.
Mais, selon une note de la Direction du renseignement militaire (DRM), révélée par Disclose mi-avril, 48 canons Caesar produits par l'industriel français Nexter "appuient les troupes loyalistes, épaulées par les forces armées saoudiennes, dans leur progression en territoire yéménite".
Une carte de la DRM estime que "436.370 personnes" sont "potentiellement concernées par de possibles frappes d'artillerie", dont celles des canons français.
"Il ne suffit pas de dire +j'ai des garanties+, il faut nous les montrer. De même, nous aimerions qu'on nous explique clairement, nettement, comment l'Arabie Saoudite lutte contre le terrorisme au Yémen", Aymeric Elluin, d'Amnesty international France.
L'Acat conteste la décision de la Direction générale des douanes et droits indirects (DGDDI) d'autoriser le cargo Bahri Yanbu "à procéder à un chargement, exportation et transfert au sens de l'article 6 du Traité sur le Commerce des Armes, de matériels de guerre et matériels assimilés, dans le port du Havre, à destination finale de Djeddah en Arabie Saoudite".
Emmanuel Macron a promis de s'engager "davantage", aux côtés des Nations unies, "dans la résolution du conflit au Yémen", "l'une des plus graves crises humanitaires que nous ayons aujourd'hui à affronter".
Ryad a pris la tête en 2015 d'une coalition militaire comprenant les Emirats arabes unis pour soutenir le président yéménite Abd Rabbo Mansour Hadi contre les rebelles Houthis, qui ont pris le contrôle de vastes territoires. Ce conflit a entraîné la mort de dizaines de milliers de personnes, dont de nombreux civils, selon diverses organisations humanitaires.
Environ 3,3 millions de personnes sont toujours déplacées et 24,1 millions, soit plus des deux tiers de la population, ont besoin d'assistance, selon l'ONU.
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