Depuis ce week-end, coïncidant avec le début de la saison touristique et jusqu'au 30 octobre, Délos, situé au milieu de l'archipel des Cyclades, accueillera 29 statues représentant le corps humain à taille réelle.
Des oeuvres qui illustrent le parcours du sculpteur depuis les années 90 jusqu'à nos jours. Mais cinq sculptures ont été conçues spécialement pour l'exposition.
"C'est une responsabilité extraordinaire, un défi et un privilège incroyable d'exposer sur ce site où aucun artiste vivant n'a mis le pied depuis deux mille ans", a déclaré à l'AFP Antony Gromley, présent à l'ouverture au public de son exposition "Sight" (Vue), sur l'Antiquité.
Installées entre des vestiges remontant à la préhistoire et allant jusqu'à l'époque hellénistique, ses oeuvres explorent la relation entre le corps humain, le temps et l'espace, une approche chère à l'artiste.
"Il s'agit d'un dialogue" entre la civilisation contemporaine et le passé, un commentaire sur "la condition humaine", relève Elina Kountouri, directrice de l'ONG Neon, organisatrice de l'exposition et co-curatrice avec Iwona Blazwick, directrice de la galerie britannique Whitechapel.
Inscrit au patrimoine mondial de l'Unesco et mis au jour grâce aux fouilles de l'Ecole française archéologique entamées à la fin du XIXe siècle, le site de Délos s'étend sur une superficie de 3,5 km2.
C'est sur cette terre aride entre pentes douces et roches de granit, couverte au printemps d'un tapis jaune et violet, que Léto donna naissance à Apollon et Artémis de la mythologie grecque antique.
L'île a prospéré pendant l'Antiquité, à la fois comme centre religieux et commercial. Son port était à l'époque un carrefour d'échanges, d'idées et de civilisations dans le sud-est de la Méditerranée.
Silhouettes en acier
"Le site de Délos constitue un voyage dans le temps et l'exposition propose une lecture du passé, une expérience personnelle pour nourrir la mémoire de chacun de nous", relève Demetrios Athanassoulis, directeur du département des antiquités des Cyclades.
Des silhouettes en acier, moulées ou composées de cubes et de parallélépipèdes, sont installées au milieu de l'Agora des Compétaliastes, dans la maison de Dionysos, au milieu du théâtre antique, dans l'antre de Héraclès, devant le Lac sacré, ou sur le mont Cynthe, qui surplombe le site.
Certaines sont déjà visibles depuis la mer en venant de Mykonos: une statue représentant un homme nu au regard droit, guette à l'extrémité nord du site, non loin de deux statues similaires, l'une installée dans l'eau à l'entrée du port de Délos, l'autre à l'entrée du site antique.
Pour Antony Gromley, "Délos est un lieu extraordinaire pour réfléchir sur l'homme et le temps alors que dans notre civilisation digitale actuelle, personne n'a vraiment de temps".
C'est "la lumière, l'atmosphère particulière du site qui reflètent des sensations hors de notre civilisation industrielle", souligne l'artiste qui expose pour la première fois en Grèce.
Ce lieu nous invite à "arrêter de penser pour contempler (...), apprendre à écouter les marbres et répondre à la géologie de l'île".
Entamé il y a un an et demi, le projet de l'exposition s'est avéré "laborieux", selon Elina Kountouri.
Une étude détaillée a été élaborée en collaboration avec les services archéologiques grecs pour transporter les statues en Grèce, dont le poids varie de 70 à 1.500 kilos, et respecter les conditions strictes des services archéologiques pour la préservation du site.
Signe du respect des règles, aucune sculpture n'est posée entre les ruines des sanctuaires, d'Apollon ou d'Artemis.
"Notre initiative n'était pas de promouvoir Délos, connue mondialement, mais d'offrir une nouvelle dimension, une perception particulière du passé", souligne Demetrios Athanassoulis.
En ce sens, l'œuvre de Gormley a "un effet catalyseur pour une lecture de notre passé, du présent et de l'avenir à travers les yeux d'un artiste inspiré", conclut-il.
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