L'exécutif bulgare se réjouit de "la grande publicité" offerte par la visite de François dans l'ancien pays communiste devenu membre de l'UE en 2007.
Pour le Premier ministre Boïko Borissov, un conservateur au pouvoir de façon quasi ininterrompue depuis dix ans, la présence du pape en Bulgarie, puis en Macédoine, deux pays très majoritairement orthodoxes, permettra "d'attirer l'attention sur le développement pacifique" de la région des Balkans.
La visite papale s'annonce comme une respiration bienvenue pour son gouvernement, empêtré depuis des semaines dans une série de scandales immobiliers mettant en cause des responsables de la majorité.
La lutte contre la corruption est l'un des talons d'Achille de la Bulgarie, pays de l'UE au plus faible niveau de vie. C'est aussi l'un des chevaux de bataille du pape argentin...
La constance de François à plaider pour l'accueil des réfugiés pourrait aussi sonner comme un rappel aux autorités bulgares, épinglées à plusieurs reprises pour leur traitement des demandeurs d'asile.
Nationalistes bulgares
Trois jours avant son arrivée, le pape a ainsi fustigé "le nationalisme conflictuel qui construit des murs, voire du racisme".
"La façon avec laquelle une nation accueille les migrants révèle sa vision de la dignité humaine", a-t-il assené jeudi au Vatican.
Son programme prévoit d'ailleurs un arrêt lundi dans un centre d'accueil en banlieue de Sofia pour y saluer des réfugiés.
En avril 2018, le Conseil de l'Europe s'inquiétait de l'absence de volonté des municipalités bulgares d'intégrer des familles de réfugiés du Moyen-Orient et de l'attitude "généralement négative de l'opinion publique" à leur égard.
Le parti conservateur de Boïko Borissov gouverne depuis 2017 avec des formations nationalistes, dont les représentants "recourent aux discours de haine et à des comportements agressifs envers les groupes les plus vulnérables de la société pour surfer sur les peurs de la population", déplore le dernier rapport de la branche bulgare de l'ONG Comité d'Helsinki.
Après les rencontres d'usage avec le Premier ministre et le chef de l'Etat Roumen Radev, proche de l'opposition socialiste, François prononcera son premier discours devant les autorités politiques et civiles du pays.
Seul dans la cathédrale orthodoxe
Il sera ensuite reçu au siège du Patriarcat de l'Eglise orthodoxe bulgare. L'accueil devrait y être cordial mais limité aux strictes formalités: la direction de l'Eglise orthodoxe a rejeté à l'unanimité toute forme de service religieux ou de prière aux côtés du chef des 1,3 milliard de catholiques.
C'est donc tout seul que le pape se retrouvera à la mi-journée à la cathédrale orthodoxe Alexandre Nevski, principal monument de Sofia, pour prier devant le trône de saints Cyrille et Méthode, deux frères vénérés pour avoir évangélisé les Slaves au 9e siècle.
Et le lendemain, une rencontre inter-religieuse "pour la paix" sera également désertée par les orthodoxes qui n'y enverront qu'un choeur d'enfants. En revanche, l'imam ou le mufti de Sofia sera présent, indique une source du Vatican.
Repliée sur elle-même et plutôt proche de Moscou, l'Eglise bulgare est la seule dans le monde orthodoxe à boycotter une commission de dialogue avec le Vatican.
Une frilosité que lui reprochent certains fidèles bulgares: "Je suis chrétienne orthodoxe, mais j'admire l'ouverture et la sensibilité du pape. Pourquoi s'accrocher aux dogmes du Moyen-Age ? Il n'y a qu'un seul Dieu", a confié Dora Kraytcheva, 48 ans, avant l'arrivée du pape.
82,6% des Bulgares se déclarent orthodoxes, 12% musulmans, pour 0,6% de catholiques, soit 44.000 personnes sur 7 millions d'habitants.
François suivra les pas de Jean Paul II, premier pape à s'être rendu en Bulgarie, en 2002.
Mais aussi ceux de Giuseppe Roncali qui eut dans ce pays un rôle d'ambassadeur du Vatican de 1925 à 1935, avant de devenir le pape Jean XXIII (1958-1963) et de démarrer le Concile Vatican II qui a prôné l'ouverture vers les autres religions. Le logo du voyage lui rend d'ailleurs hommage.
La première journée du pape chez les Bulgares se terminera par une messe pour les catholiques de Sofia, minuscule communauté des périphéries de l'Europe que François entend encourager.
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