Les derniers jours n'ont pourtant pas dû être de tout repos pour la double championne olympique du 800 m: apparue seulement jeudi sur la liste de départ, Caster Semenya avait été déboutée la veille par le Tribunal arbitral du sport (TAS) de son recours contre les règles de la Fédération internationale d'athlétisme (IAAF) obligeant certaines athlètes nées avec une différence de développement sexuel (DSD) à faire baisser leur taux de testostérone sous le seuil de 5 nmol/L de sang par un traitement pour courir dans la catégorie féminine.
Le 800 m de Doha devait être le dernier avant l'application du règlement exigée dès le 8 mai par l'IAAF (pour les distances allant du 400 m au mile, 1.609 m). Et comme un symbole, Caster Semenya l'a emporté dans un temps très rapide (1:54.98), devant la Burundaise Francine Niyonsaba (1:57.75), une autre athlète hyperandrogène a priori concernée par la nouvelle réglementation.
"C'était une course incroyable (...) Tout ça, c'est une histoire pour inspirer les gens. C'est plus qu'un jeu, bien plus que du sport. On parle de dignité humaine, de fierté", a déclaré Caster Semenya en zone mixte, souriante malgré le contexte.
Combat perdu pour l'instant
Le symbole, Caster Semenya en a l'habitude. La Sud-Africaine cristallise depuis 10 ans le débat juridique, scientifique et médiatique autour de la question des athlètes hyperandrogènes, à la production naturelle de testostérone élevée, et du gain physiologique, injuste selon l'IAAF, qu'elle procure dans certaines disciplines.
Elle n'avait que 18 ans en 2009 lorsque, jeune athlète timide, son genre a été mis en doute par l'IAAF le jour même de sa première finale mondiale. Elle est devenue depuis une icône mondiale aux 215.000 abonnés sur Twitter, massivement soutenue par le gouvernement sud-africain dans son combat pour concourir telle qu'elle est dans la catégorie féminine.
Ce combat est pour l'instant perdu, même si elle peut encore faire appel devant un Tribunal administratif suisse et que toutes les questions n'ont pas été résolues.
Le TAS a jugé le règlement "discriminatoire", mais "nécessaire, raisonnable et proportionné", tout en soulevant des points d'inquiétude auquel l'IAAF devra répondre, comme la question des effets secondaires du traitement à suivre ou le "manque de preuves" de l'avantage de ces athlètes sur les distances du 1.500 m et du mile.
'Des médicaments? Pas question!'
Reste à savoir quel sera le choix de Semenya quant à la suite de sa saison, et quelles sont les athlètes réellement concernées, sachant que la règle ne s'applique pas à toutes les athlètes présentant des différences du développement sexuel (DSD).
"Je ne sais pas quelle va être la suite (...) Prendre des médicaments? Pas question!", s'est indignée Semenya, qui a pourtant assuré vouloir défendre son titre de championne du monde en septembre.
"Personne ne doit me dire quoi faire. Si des gens veulent m'empêcher de faire quelque chose c'est leur problème, pas le mien."
Les athlètes qui n'auraient pas anticipé la décision du TAS vont connaître une saison presque blanche: il faut respecter le seuil de testostérone pendant 6 mois pour être éligible à une compétition internationale, l'IAAF ne proposant une exception que pour les Mondiaux de Doha (27 septembre - 6 octobre) à condition de commencer le traitement d'ici le 8 mai.
"Nous sommes ravis que Caster ait fait ce pour quoi elle est connue, malgré toutes les épreuves qu'elle doit affronter", s'est réjoui le président de la fédération sud-africaine d'athlétisme Aleck Skhosana auprès de l'AFP.
La semaine dernière, les championnats d'Asie s'étaient déroulés presque sans spectateurs, dans le stade Khalifa climatisé (environ 26 degrés contre plus de 30 à l'extérieur), qui doit accueillir les Mondiaux en septembre et la Coupe du monde de foot en 2022. Vendredi, il était rempli environ à moitié, et l'ambiance a été assurée par les communautés kényanes et éthiopiennes vivant au Qatar.
Les Oromos notamment, une ethnie éthiopienne, ont poussé dans un vacarme assourdissant leur championne Genzebe Dibaba, qui a été devancée par la Kényane Hellen Obiri sur le 3.000 m (8:25.60), dernière course de la soirée.
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