Qualifiée jeudi de "totalement irresponsable" par le Premier ministre Edouard Philippe, la brève intrusion a suscité une vague d'indignations dès mercredi dans la classe politique et sur les réseaux sociaux.
En cause, notamment, la tentative de certains manifestants de pénétrer via une passerelle au sein du service de réanimation chirurgicale. Une cinquantaine de personnes étaient montées sur cette passerelle, selon des témoins.
Ce service accueille "des patients particulièrement vulnérables", a dénoncé le directeur général de l'Assistance publique - Hôpitaux de Paris (AP-HP), Martin Hirsch, qui a porté plainte et fait état d'images de vidéosurveillance "absolument édifiantes".
Le parquet de Paris a ouvert une enquête, 32 personnes étant actuellement en garde à vue pour attroupement en vue de commettre des dégradations ou des violences. La Sûreté territoriale a été saisie.
"Il n'y a pas eu de dégât dans la réanimation", a constaté la ministre de la Santé Agnès Buzyn, venue sur place jeudi pour témoigner son soutien aux personnels qui ont empêché l'intrusion dans le service en en bloquant l'un des accès, une porte vitrée située à l'arrière et dénuée de toute inscription, selon un journaliste de l'AFP.
Les manifestants, qui n'avaient pas "le visage masqué ni cagoulé (...) voulaient rentrer", a témoigné jeudi l'infirmier Michael Matos. "Est-ce qu'ils voulaient nous agresser, est-ce qu'ils voulaient juste échapper à quelque chose? On ne savait pas, donc pour le bien des patients, on a juste fermé la porte, on a maintenu et on a attendu que les forces de l'ordre interviennent", a-t-il ajouté.
Pour son collègue Jérôme Leclercq, "il n'y avait rien de violent, en tout cas envers nous (...). C'était plus un état de panique, la peur de se faire taper, de recevoir quelque chose de la police, qu'une attaque, mais au final tout s'est passé très calmement".
Agnès Buzyn, qui avait dans la matinée dénoncé une "exaction", un acte "inqualifiable", s'est dite ensuite sans "preuve aujourd'hui" de dégradations dans d'autres services de l'établissement.
"Mensonge"
Plus tôt sur BFMTV, un professeur du service réanimation, Mathieu Raux, avait lui déploré la "perte de l'ensemble du matériel vandalisé du service informatique du service de chirurgie digestive".
Contactée, l'AP-HP n'avait fourni aucun bilan en début d'après-midi.
Mercredi, le ministre de l'Intérieur Christophe Castaner s'était également rendu à la Pitié, où un CRS a été admis pour une blessure à la tête, évoquant une "attaque" de militants anticapitalistes d'ultragauche "black blocs".
Mais, depuis, plusieurs témoignages et vidéos diffusées sur les réseaux sociaux laissent penser que des manifestants auraient pu chercher à se réfugier dans l'enceinte de l'hôpital, dotée d'espaces verts et qui s'étend sur plusieurs hectares, pour échapper aux charges des forces de l'ordre ou à l'air saturé de gaz lacrymogènes.
"Nous étions dans un nuage opaque de gaz irrespirable, les gens ont fui sans savoir où ils allaient", a expliqué à l'AFP la "gilet jaune" Sophie Tissier, présente "boulevard de l'hôpital", où se situe l'établissement, "quand la nasse a été fermée".
Une journaliste de l'AFP a également constaté une foule très compacte, des gens paniqués qui se réfugiaient dans les immeubles à leur portée.
La CGT de l'AP-HP a de son côté dénoncé dans un communiqué "l'amalgame fait entre un groupe ultra organisé et violent ("black blocks") et les 80.000 manifestants qui ont défilé pacifiquement à Paris".
Elle a réclamé "une totale transparence" et condamné l'attitude de Mme Buzyn, "plus prompte à communiquer (...) sur le non-événement de la Pitié" qu'à "aller à la rencontre des personnels de santé" en grève.
Détonnant dans le paysage politique, où des représentants de la majorité, des Républicains ou du Rassemblement national ont condamné l'incident, le chef de file des Insoumis Jean-Luc Mélenchon a lui fustigé un "mensonge de Castaner", qu'il accuse d'avoir "inventé" l'attaque de la Pitié, un an après "les mensonges de Benalla".
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