Après la destitution le 11 avril du président Omar el-Béchir par l'armée sous la pression d'un mouvement de contestation inédit lancé en décembre, un Conseil militaire de transition a pris le pouvoir pour deux ans.
Les meneurs de la contestation, qui réclament un gouvernement civil, et les militaires au pouvoir se sont mis d'accord samedi sur la création d'un Conseil conjoint qui remplacerait le Conseil militaire de transition, mais des désaccords persistent sur sa composition.
Les représentants de la contestation proposent un conseil de 15 membres, dont huit civils, tandis que l'armée veut un conseil de 10 membres, dont sept militaires.
Mardi, le général Salah Abdelkhalek, membre du Conseil militaire, a annoncé que le chef de cette instance, Abdel Fattah al-Burhane, serait "le chef du (futur) Conseil souverain".
L'Alliance pour la liberté et le changement (ALC), fer de lance de la contestation, a alors accusé les militaires de "ne pas envisager sérieusement de céder le pouvoir au peuple."
L'ALC a également appelé "à une marche d'un million (de manifestants) le 2 mai" pour un pouvoir civil, ce qui a exacerbé les tensions.
Le Soudan est le théâtre depuis décembre d'un mouvement de contestation, déclenché par le triplement du prix du pain et qui a conduit à la destitution de M. Béchir, aujourd'hui incarcéré.
Les manifestants qui tiennent un sit-in depuis le 6 avril devant le QG de l'armée à Khartoum réclament désormais le transfert immédiat du pouvoir à un gouvernement civil.
Le Conseil militaire a toutefois prévenu qu'il ne laisserait pas le chaos s'installer et exhorté les manifestants à retirer les barricades installées et à rouvrir les routes et les ponts bloqués aux alentours du QG de l'armée.
La situation s'est d'autant plus tendue mardi que les militaires ont annoncé la mort de six membres des forces de sécurité, tués dans des heurts avec les manifestants à travers le pays.
"Chercher les ennuis"
Mardi, les deux camps ont tenu des conférences de presse séparées pour expliquer leurs divergences.
"Le Conseil militaire maintient que le Conseil (conjoint) souverain devrait être dirigé par les militaires avec une représentation civile", a accusé Mohammed Naji al-Assam, un dirigeant de l'Association des professionnels soudanais (SPA), qui fait partie de l'ALC.
Les militaires, selon lui, cherchent à "accroître leurs pouvoirs quotidiennement".
Mais, dans une interview mercredi à l'AFP, Sadek al-Mahdi, le leader de l'opposition, a mis en garde les meneurs de la contestation contre toute tentative de leur part de provoquer les militaires.
Cet ancien Premier ministre évincé du pouvoir en 1989 par le coup d'Etat d'Omar el-Béchir a assuré que le Conseil militaire n'allait pas tarder à transférer le pouvoir aux civils.
"Si nous provoquons (...) les forces armées qui ont contribué au changement, cela revient à chercher les ennuis", a-t-il ajouté.
Le chef-adjoint du Conseil militaire, Mohamad Hamdan Daglo, avait affirmé que les militaires au pouvoir étaient investis dans les négociations mais qu'ils ne laisseraient pas le chaos s'installer.
Le général Chamseddine Kabbachi, porte-parole du Conseil militaire de transition, a fait état de "pillages, de violences sur des citoyens, de routes bloquées, d'attaques contre les forces de sécurité".
"Les forces armées doivent rester au sein du Conseil souverain" en raison des tensions que traversent le pays, a affirmé mardi M. Kabbachi.
Le Conseil militaire de transition, composé de dix membres, a jusque-là résisté aux appels à céder le pouvoir et les manifestants, qui ont reçu le soutien de Washington, les ont accusé de ne pas être si différents du président déchu.
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