La politique étant avant tout "un art de l'exécution", comme aime à le répéter Edouard Philippe, charge donc aux ministres de M. Macron de décliner concrètement la panoplie de mesures de sortie du grand débat, dévoilées jeudi dernier par le chef de l'Etat.
Baisse de l'impôt sur le revenu, réorganisation profonde de l'administration, décentralisation, gestes pour les retraités, les aidants et les mères vivant seules...: "Une révolution", s'enthousiasme le président du MoDem François Bayrou, qui donnera à chacun matière à plancher dans les semaines à venir.
L'équipe gouvernementale, autour du Premier ministre qui devrait s'exprimer devant la presse à son arrivée, se réunit donc à partir de 09H00 pour une journée de travail. "L'occasion de discuter des mesures, de la méthode, du calendrier, donc de toute la mise en oeuvre opérationnelle des annonces du président", résume-t-on à Matignon.
Mais ce "ne sera pas un simple séminaire gouvernemental comme on a pu les connaître depuis le début du quinquennat", au rythme d'un par trimestre, avait prévenu la semaine passée la porte-parole du gouvernement Sibeth Ndiaye.
Des représentants de la majorité (présidents de groupe à l'Assemblée et au Sénat, présidents de commissions, rapporteurs généraux) sont effectivement conviés à partir de midi. Une façon de mettre de l'huile dans les rouages de l'axe majorité parlementaire - exécutif, alors que des députés avaient vivement déploré ne pas avoir été mieux écoutés et associés lors de la crise des "gilets jaunes".
Quatre ateliers sont prévus dans l'après-midi, dont l'un sur le calendrier parlementaire, qui devra anticiper l'embouteillage de textes législatifs jusqu'à l'été, et un autre sur la méthode de travail.
Le séminaire se penchera aussi sur la réforme constitutionnelle, alors qu'Emmanuel Macron envisage désormais 20% de proportionnelle pour élire les députés, tout en concédant au Sénat une réduction moindre du nombre de parlementaires par rapport à son intention de départ (25% plutôt que 30%).
Un atelier abordera enfin "les nouvelles solidarités", à savoir la dépendance, le statut des aidants etc.
L'enveloppe manquante
Mais l'équation la plus délicate revient à Bercy qui devra trouver des pistes de financement des mesures, comme les 5 milliards de baisse d'impôt sur le revenu.
Les oppositions se sont d'ailleurs rapidement engouffrées dans cette brèche. Le patron des Républicains Laurent Wauquiez a ainsi fustigé le manque d'annonces "sérieuses" sur la baisse de la dépense publique quand Marine Le Pen a épinglé dimanche le "flou" de ces annonces qui ne seront "pas suivies d'effet".
"La trajectoire budgétaire n'est pas modifiée", a crânement assuré en retour vendredi le patron des députés LREM Gilles Le Gendre pour récuser toute incertitude.
Même en s'attaquant à certaines niches fiscales comme l'a annoncé M. Macron, cela s'apparente à une gageure: l'économiste Jean Pisani-Ferry, coordinateur du programme présidentiel, a estimé dans le Journal du Dimanche à "20 milliards d'euros, soit 1% du PIB du pays" l'enveloppe à trouver d'ici 2021. Et, pour compliquer la donne, le président s'est dit prêt à transiger sur la coupe attendue de 120.000 fonctionnaires d'ici à la fin du quinquennat, afin d'assurer un meilleur maillage du territoire.
Alors que Jean-Paul Delevoye travaille depuis des mois sur une réforme globale du système des retraites, des précisions sont attendues pour compenser la réindexation des pensions sur l'inflation et la promesse d'une retraite minimale de 1.000 euros pour ceux qui auront une carrière complète. Le chef de l'Etat a indiqué vouloir actionner deux leviers: l'allongement de la durée de cotisation et des incitations à travailler plus longtemps.
D'autres points pourraient être abordés, à l'image de l'abaissement de la vitesse à 80 km/h, selon Sibeth Ndiaye. Il s'agira de réfléchir à "la manière dont on peut faire en sorte qu'il n'y ait pas une application brutale, uniforme sur l'ensemble du territoire", a-t-elle lancé dimanche.
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