Le scrutin pourrait donc déboucher sur une poursuite de l'instabilité qui marque la politique espagnole depuis la fin du bipartisme conservateurs-socialistes en 2015, avec un parlement fragmenté et des divisions exacerbées par la tentative de sécession de la Catalogne en 2017.
Après le dépouillement de plus de 60% des bulletins de vote, le Parti socialiste de M. Sanchez recueillait 29,45 % des voix et 124 députés, nettement plus que les 85 remportés aux législatives de 2016, mais loin de la majorité absolue de 176 sur 350 à la chambre. Il sera donc obligé de bâtir une coalition hétérogène pour continuer à gouverner.
En face, les conservateurs du Parti populaire (PP) en pleine dégringolade et les libéraux de Ciudadanos n'étaient pas en mesure de réunir les voix pour l'en empêcher, même en s'alliant avec le parti d'extrême droite Vox, qui recueille 9,97% des suffrages et 23 sièges, selon ces résultats partiels. Le PP aurait 65 sièges, contre 137 en 2016, et Ciudadanos 57, contre 32 en 2016.
Vox, pratiquement inconnu jusqu'à son irruption au parlement d'Andalousie (sud) l'année dernière, a fait ressurgir l'extrême droite dans un pays où elle était insignifiante depuis la mort de Franco en 1975.
Mais ce parti progresse en soufflant des électeurs au PP et à Ciudadanos, donc même en unissant leurs forces, ces trois partis ne pourraient pas rééditer le succès qu'ils ont obtenu en Andalousie, où ils ont chassé les socialistes de leur fief au début de l'année.
Participation massive
Le taux de participation a été de 75,41 %, près de neuf points de plus qu'en 2016, selon le ministère de l'Intérieur.
Pedro Sanchez avait mis en garde contre le "risque réel" d'une sous-estimation du score de Vox, un parti soutenu notamment en Europe par le Front national français et la Ligue au pouvoir en Italie.
A Madrid, Carlos Gonzalez, un retraité du BTP, a expliqué avoir voté pour "l'option modérée" représentée par les socialistes. Vox "va en arrière, vers le passé. Ce n'est pas l'avenir, l'avenir est à une Europe unie", assure-t-il.
Mais près de Barcelone, Dolores Palomo, qui a voté Ciudadanos, a rejeté "la politique de la peur" de l'extrême droite orchestrée par M. Sanchez. Cette aide ménagère de 48 ans et ancienne électrice socialiste voulait croire que si le PP et Ciudadanos faisaient alliance avec Vox, ils s'assureraient que "cela ne soit pas une extrême droite radicale".
Gonzalo Rodríguez, un étudiant madrilène de 18 ans, a voté pour la première fois, pour Vox, "le seul parti, selon lui, qui défend l'unité de l'Espagne et les valeurs de la famille traditionnelle".
Cette formation au virulent discours antiféministe et contre l'immigration, qui a massivement fait campagne sur les réseaux sociaux, a prospéré en particulier en prônant la manière forte en Catalogne.
Intenses tractations
Cette région du nord-est, où les séparatistes ont déclenché en 2017 la pire crise politique qu'ait connue l'Espagne en quarante ans, continue à hanter la politique espagnole.
La droite et l'extrême droite ont ainsi fait une campagne très agressive en accusant Pedro Sanchez d'être un "traître" pour être parvenu au pouvoir en partie grâce aux voix des séparatistes catalans et pour avoir tenté de dialoguer avec eux.
Pedro Sanchez pourra compter sur l'appui de Podemos - gauche radicale -, crédité de 33 sièges, mais devrait avoir besoin de celui de partis régionalistes donc, a priori, des indépendantistes catalans.
Mais le socialiste préférerait éviter d'avoir de nouveau besoin de ces derniers, qui l'ont contraint à convoquer ces élections anticipées en refusant de voter son budget.
Reste l'hypothèse d'une alliance avec Ciudadanos dont le chef Albert Rivera avait pourtant juré de "chasser Sanchez du pouvoir".
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