Un Conseil militaire de transition est au pouvoir au Soudan depuis le renversement par l'armée du président Omar el-Béchir le 11 avril sous la pression de la rue. Mais le mouvement de contestation réclame que cette instance, qui s'est donnée un mandat de deux ans, transfère le pouvoir à une autorité civile sans plus tarder.
Face à une contestation qui va crescendo, le Conseil militaire a annoncé mercredi soir avoir conclu un "accord" avec l'Alliance pour la liberté et le changement (ALC), "sur la plupart des exigences présentées" par cette coalition des principales formations du mouvement de protestation, sans donner plus de détails.
"Comité conjoint"
Dans un communiqué sur Twitter, l'Association des professionnels soudanais (SPA), fer de lance de la contestation qui fait partie de l'ALC, a vu dans cette réunion une étape vers un "renforcement de la confiance" entre les deux parties.
Elle a fait état de la mise en place d'un "comité conjoint" pour "discuter des problèmes en suspens".
Peu après la réunion, le Conseil militaire a annoncé la démission de trois de ses dix membres, les généraux Omar Zinelabidine, Jalaluddine al-Cheikh et Al-Tayeb Babikir. Il n'a pas fourni d'explications.
Mais dans la rue, les manifestants, rassemblés jour et nuit depuis le 6 avril devant le quartier général de l'armée à Khartoum, maintiennent la pression.
Jeudi, une foule est attendue à Khartoum pour une "marche d'un million de personnes" à laquelle a appelé la SPA mercredi.
"Nous sommes très contents des démissions, mais cela ne veut pas dire qu'on va partir. Notre demande principale, une administration entièrement civile, n'a pas été satisfaite", a déclaré à l'AFP Ahmed Najdi, un manifestant.
En attendant, "ce que nous espérons maintenant c'est un conseil souverain militaro-civil, sur lequel, je pense, la plupart des manifestants seraient d'accord", a-t-il ajouté.
Pour la première fois, des juges devraient rejoindre les manifestants. Ils se mobiliseront "pour soutenir le changement et pour (réclamer) un système judiciaire indépendant", selon un communiqué diffusé mercredi par une association professionnelle de juges.
Mardi et mercredi, des centaines de personnes venues d'autres villes du Soudan dont Madani et Atbara (centre) avaient rejoint les manifestants, selon des témoins.
L'un des leaders de la contestation, Siddiq Farouk, avait menacé mercredi d'une "grève générale" à travers le pays si le Conseil militaire n'accédait pas aux revendications des manifestants.
La contestation, déclenchée le 19 décembre après la décision du gouvernement Béchir de tripler le prix du pain, s'est rapidement transformée en contestation inédite du président aujourd'hui déchu et emprisonné, et plus largement du système en place.
Le mouvement a reçu cette semaine le soutien de Washington qui a dit appuyer "la demande légitime" des Soudanais d'un gouvernement dirigé par des civils.
Pressions américaines
"Nous sommes ici pour encourager les parties à oeuvrer ensemble afin de faire avancer ce projet au plus tôt", a déclaré mardi à l'AFP Makila James, responsable du département d'Etat américain chargée de l'Afrique de l'Est qui s'est rendue à Khartoum.
"Le peuple du Soudan a formulé clairement sa demande", a-t-elle souligné. "Nous voulons le soutenir dans cela, c'est la meilleure voie pour aller vers une société respectueuse des droits humains".
Un responsable américain avait indiqué plus tôt en avril que les Etats-Unis étaient prêts à retirer le Soudan de leur liste des pays accusés de soutenir le terrorisme si le Conseil militaire engageait un "changement fondamental" de gouvernance.
Arrivé au pouvoir par un coup d'Etat en 1989, M. Béchir a dirigé d'une main de fer un pays miné par une situation économique désastreuse et par des rébellions dans plusieurs régions. La Cour pénale internationale (CPI) a lancé des mandats d'arrêt contre lui pour "crimes de guerre" et "génocide" dans la région du Darfour (ouest).
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