Plusieurs voix importantes dans le monde de la culture, dont l'animateur Stéphane Bern et l'ancien ministre de la Culture Jack Lang, ont exprimé leur préoccupation à l'encontre de ces dérogations prévues dans le projet.
Le ministère de la Culture a réfuté ces critiques: "il ne s'agit nullement de déroger aux principes fondamentaux de la protection du patrimoine. La restauration au contraire doit constituer un exemple de restauration avec un très haut degré d'exigence", assure-t-il.
Les règles, pour les dérogations, "sont très étroitement délimitées", insiste-t-il, et l'exposé des motifs de la loi "vise spécifiquement la législation applicable aux abords des monuments, et non les monuments eux-mêmes". Il s'agit "de ne pas ralentir la mise en place de constructions provisoires (bases chantier, installation d'accueil et du public, cathédrale éphémère).
Le texte, intitulé "Restauration et conservation de Notre-Dame de Paris et institution d'une souscription nationale", propose des avantages fiscaux pour les donateurs, un comité de contrôle pour "le bon emploi des fonds" et un établissement public chargé de concevoir et réaliser les travaux.
Mais aussi, selon le compte-rendu du conseil des ministres, de "prendre par ordonnance les mesures d'aménagement ou de dérogation à certaines dispositions législatives qui seraient nécessaires afin de faciliter la réalisation des travaux".
Réagissant à chaud, M. Bern, chargé depuis 2017 d'une mission patrimoine par le président Emmanuel Macron, s'est déclaré "inquiet".
"Le risque (des dérogations) est de créer des précédents. Il y a beaucoup de précipitation. Les lois d'exception, ça m'angoisse toujours. Il ne faut pas confondre vitesse et précipitation", a dit à l'AFP l'animateur de télévision.
"aussi dangereux qu'inutile"
Alexandre Gady, président de l'association de défense du patrimoine "Site et monuments", déplore ces exceptions à des règles immuables qui mettaient les architectes du patrimoine au centre des décisions.
Elles "créent un précédent aussi dangereux qu'inutile et envoient un mauvais signal aux citoyens dont les impôts payent les services du ministère de la Culture", commente-t-il.
"Mieux vaudrait suivre les procédures mises en place depuis plus d'un siècle et demi que de se précipiter... pour les Jeux Olympiques", estime cet architecte militant du patrimoine.
Un autre regret, dit-il, est "l'impossibilité d'affecter les dons pour d'autres monuments, alors que la somme recueillie couvre très largement les besoins de l'édifice".
L'ancien ministre de la Culture Jack Lang salue "la célérité" du gouvernement et la création d'un établissement public qui permet qu'"un véritable commando prenne les choses en mains".
Sa "seule réserve", ajoute-t-il, "porte sur la liberté qui serait accordée de s'affranchir des règles du marché public".
Récusant l'argument du gain de temps et de l'efficacité, il cite les importants chantiers réalisés quand il était au gouvernement -la Pyramide du Louvre, la cathédrale de Strasbourg, des vastes travaux à Notre-Dame de Paris-- qui ont été exécutés rapidement sans aucune dérogation.
Selon certains observateurs, c'est le ministère de la Culture et Franck Riester qui se trouveraient dépossédés de leur prérogatives par ce projet qui doit être discuté à l'Assemblée nationale et qui peut être contesté au Conseil d'Etat.
La juriste et conseillère d'Etat, Maryvonne de Saint-Pulgent, note que les termes "conservation" et "restauration" définissent le projet. Ce qui semble impliquer que les dons issus de la souscription nationale n'iront pas à la "création".
Concernant les "mesures de dérogation qui seraient nécessaires pour la réalisation des travaux", le texte stipule un "encadrement", a-t-elle dit à l'AFP, les dérogations devant être notamment "subordonnées à un motif d'intérêt général".
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