Arrivés depuis le Panama par avion au petit matin, les 24 tonnes de matériel médical et 14 groupes électrogènes étaient acheminés dans l'après-midi par une trentaine de camions dans un hangar de l'est de Caracas, a constaté une journaliste de l'AFP. Le matériel doit ensuite être distribué à huit hôpitaux et 30 centres médicaux, selon le ministre de la Santé Carlos Alvarado.
Cette aide représente "un grand pas en avant qui permet d'aider les plus vulnérables", a jugé Francesco Rocca, président de la Fédération internationale des sociétés de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge, qui avait annoncé fin mars l'envoi de cette aide destinée "à 650.000 personnes dans un premier temps".
Les hôpitaux du Venezuela, qui affronte la pire crise de son histoire récente, ont toutes les peines du monde à soigner leurs patients : les antibiotiques manquent, de même que les compresses, les appareils respiratoires ou les traitements destinés aux malades chroniques.
Les pannes de courant à répétition plongent les hôpitaux dans le noir et empêchent toute utilisation des appareils de dialyse et des scanners.
Selon les Nations unies, un quart des 30 millions de Vénézuéliens ont besoin d'une aide urgente. D'après un rapport de l'organisation, quelque 3,7 millions d'entre eux souffrent de malnutrition, et au moins 22% des enfants de moins de cinq ans souffrent de malnutrition chronique.
"Politisation"
La Croix-Rouge vénézuélienne veut, elle, éviter "la politisation de la réussite" de l'opération humanitaire de mardi, selon les mots de son patron Mario Villarroel.
Mais cela parait très difficile, tant l'aide humanitaire est au centre de la bataille politique qui se joue entre le chef de l'Etat Nicolas Maduro et l'opposant Juan Guaido, depuis que ce dernier s'est autoproclamé président par intérim le 23 janvier. Il a depuis été reconnu comme tel par une cinquantaine de pays dont les Etats-Unis.
Peu après l'arrivée de l'avion affrété par la Croix-Rouge à Caracas, Juan Guaido a jugé que cette aide revenait à un "aveu d'échec du régime qui niait l'existence d'une urgence humanitaire il y a quelques semaines encore". Et d'évoquer "un palliatif pour maîtriser une urgence".
La crise, a-t-il affirmé, ne pourra être résolue qu'une fois que le gouvernement qui se réclame d'Hugo Chavez (1999-2013) aura "cessé d'usurper" le pouvoir.
Le gouvernement vénézuélien a, lui, salué l'arrivée de l'aide humanitaire comme fruit du travail de Nicolas Maduro "pour protéger le peuple vénézuélien" grâce au travail entrepris avec la Croix-Rouge, comme l'a affirmé le ministre des Affaires étrangères Jorge Arreaza.
Car M. Maduro avait accepté la semaine dernière de "travailler avec les agences de l'ONU pour apporter toute l'aide humanitaire qu'il est possible d'apporter", après une rencontre avec le président du Comité international de la Croix-Rouge (CICR) Peter Maurer.
Pour le pouvoir, les sanctions et le "blocus" de Washington - son ennemi le plus acharné - sont seuls responsables de ses problèmes d'approvisionnement en nourriture et en médicaments.
Le camp de Juan Guaido met au contraire en avant "l'incurie" et "la corruption" du gouvernement Maduro pour expliquer la situation actuelle.
Le 23 février, les partisans du chef de file de l'opposition ont tenté de faire entrer plusieurs tonnes d'aide humanitaire stockées aux portes du Venezuela : en Colombie, au Brésil et sur l'île néerlandaise de Curaçao.
Les camions chargés de produits de première nécessité, envoyés essentiellement des Etats-Unis, ont dû rebrousser chemin face au blocage frontalier ordonné par le gouvernement. Sept personnes ont été tuées et plusieurs centaines d'autres blessées dans des heurts.
Le président Maduro avait alors dénoncé l'opération comme un prétexte en vue d'une intervention militaire.
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