Prévu sur deux jours, le procès se tient à Nanterre car Bureau Veritas a son siège dans les Hauts-de-Seine. Il doit permettre d'examiner la recevabilité des demandes, ainsi que les responsabilités du certificateur et du chantier naval allemand, Jos L. Meyer-Werft, qui a conçu le ferry en 1980.
En moins d'une demi-heure, dans la nuit du 27 au 28 septembre 1994, le ferry, qui effectuait la liaison Tallinn-Stockholm avec 989 personnes à bord, avait sombré, faisant 852 morts ou disparus de 17 nationalités différentes, essentiellement des Suédois et des Estoniens.
Une commission d'enquête internationale avait conclu en 1997 à une déficience du système de verrouillage de la porte escamotable de proue, ayant permis à l'eau de s'engouffrer extrêmement rapidement sur le pont-garage.
"C'était un navire dont la conception était intrinsèquement dangereuse", a affirmé avant l'audience l'initiateur français de cette procédure, Me Erik Schmill, l'un des avocats des 1.116 demandeurs. "Un bateau dont le nez s'ouvre, quand vous êtes en pleine mer, face à des vagues, c'est forcément un point de faiblesse", a-t-il estimé.
En l'absence d'un renflouement du navire, échoué par 85 m de fond, et d'une expertise judiciaire indépendante - refusée par Bureau Veritas - qui aurait permis de déterminer avec certitude les causes du naufrage, les thèses complotistes avaient fleuri, certains parlant notamment d'une explosion à l'intérieur du navire, du matériel militaire ayant déjà transité dans ses cales.
Les autorités scandinaves, opposées à un renflouement du navire, ont sanctuarisé la zone et toute exploration de l'épave a été interdite.
Si les rescapés et ayants droit des disparus ont été rapidement indemnisés à hauteur de 130 millions d'euros pour leur préjudice matériel par l'armateur estonien Estline, via un fonds de compensation, ils n'ont pu demander réparation pour leur préjudice moral.
"Il y a eu indemnisation, mais on n'a jamais évoqué la question de fond. En dehors du rapport de la Commission internationale, il n'y a jamais eu de procès" et les défendeurs "ont tout fait pour faire traîner les choses", a déploré Me Schmill.
Les demandeurs réclament un montant global de plus de 40 millions d'euros pour "le traumatisme reconnu de la douleur causée par la conscience d'une mort imminente", selon Maxime Cordier, un autre de leurs avocats.
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