"On croyait qu'on était partis pour un sprint, et en fait on était partis pour un marathon. Il faut se préparer pour ça !", lance au micro l'un des participants à la deuxième "Assemblée des assemblées" des "gilets jaunes".
Qu'ils soient de Pau, Commercy, Paris ou Lure, parmi les centaines de "gilets jaunes" venus à Saint-Nazaire de vendredi à dimanche, tous reconnaissent un essoufflement de ce mouvement inédit de contestation de la politique sociale et fiscale du gouvernement, qui a réuni 282.000 personnes dans les rues et sur les ronds-points le premier samedi de mobilisation le 17 novembre, un chiffre jamais dépassé.
"Au départ il y avait énormément de monde, et aujourd'hui ça s'amenuise", lance Benny depuis l'estrade centrale. Entre les destructions de cabanes par les forces de l'ordre et la lassitude, beaucoup de ronds-points ne sont plus jaunes.
"On a un vécu commun: les cabanes détruites, une baisse de la participation, des problèmes pour se fédérer", lance Valérie, du Mans, aux plus de 700 délégués et observateurs, selon l'organisation, qui tentent tant bien que mal de tenir dans la grande salle. "Quelles sont les réponses ?".
Il faut "renforcer la base", faire valoir "les valeurs de non-violence", et, avant tout, "renforcer et poursuivre le mouvement", explique à son tour une jeune femme venue de Nanterre. Par exemple "sur la grève des enseignants pour combattre la loi Blanquer. Quelque chose est en train de monter".
Fédérer, "converger", "devenir un socle vers lequel convergeraient toutes les luttes"... Des mots qui reviennent souvent.
"Il faut définir un objectif", abonde le groupe de discussion "stratégie". "L'objectif c'est la remobilisation et la convergence, il faut mobiliser ceux qui ne sont pas encore gilets jaunes, et remobiliser les gilets jaunes". Comment ? "On refait des ronds-points et on va vers les gens pour leur parler".
"L'Etat commence à se poser la question +qu'est ce que je fais après le grand débat+. Nous on se pose la question aussi", explique Vlad (nom d'emprunt), 34 ans, venu d'Essonne. Pour lui, les "gilets jaunes" ne sont "pas moins impliqués" cinq mois après le début du mouvement.
- "Très très brouillon" -
"Ca a été tellement dur de sortir les Français dans la rue, des gens complètement déconnectés de la politique... ça a été tellement difficile qu'ils ne rentreront pas chez eux", pronostique-t-il.
Dans ce mouvement polymorphe, qui refuse toute idée de chef ou de système pyramidal, organisation, revendications et convergences -avec les associations ou organisations syndicales-, ne semblent plus être des mots interdits.
"On en a besoin de cette organisation", reconnaît Camille (nom d'emprunt). "A la base c'était très très brouillon. Aujourd'hui on s'organise de plus en plus, on arrive à se fédérer (...) Si ça reste brouillon on se fatigue, donc on a tous envie de structuration et d'organisation pour rassembler les énergies plutôt que s'éparpiller".
"Il y a un grand besoin de coordination entre les groupes", abonde Hélène, de Paimpol, au moment de restituer des débats entre "gilets jaunes" de différentes régions.
Aucun des délégués de Saint-Nazaire n'a pourtant de pouvoir décisionnel et chacun devra faire redescendre les idées pour qu'elles soient ensuite adoptées ou non localement.
D'ici là, sur les grandes feuilles qui ornent peu à peu les murs de la Maison du peuple, apparait une ébauche d'organisation et de projets, d'un 1er mai unitaire à une nouvelle "Assemblée des assemblées" au Pays-Basque au moment du G7, en passant par une grève générale à partir du 2 mai.
"J'aimerais sortir de la logique des samedis", explique à l'AFP Garance Person, qui prône partout où c'est possible l'installation de Maisons du peuple, qu'elles "pullulent".
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