Avocate spécialiste de l'environnement, sans expérience politique, Zuzana Caputova, 45 ans, pourrait devenir la première femme présidente de ce pays membre de la zone euro, selon les sondages qui lui donnent plus de 60% d'intentions de vote face au candidat soutenu par le pouvoir, le commissaire européen à l'Energie Maros Sefcovic, 52 ans.
Au premier tour, Mme Caputova, descendue dans l'arène sous le mot d'ordre "Luttons contre le mal", a obtenu 40,53% de voix contre 18,66% pour son adversaire.
"Les gens sont prêts pour le changement", a-t-elle déclaré à l'AFP.
La juriste, à l'époque une vice-présidente du parti Slovaquie progressiste, qu'elle a quitté depuis, était parmi les milliers de manifestants descendus dans les rues l'an dernier, choqués par l'assassinat par balles du journaliste Jan Kuciak et de sa fiancée.
Le journaliste s'apprêtait à publier un article sur les liens présumés entre des hommes politiques slovaques et la mafia italienne.
Les manifestations, d'une ampleur inédite, ont mis à mal le gouvernement du parti Smer-SD en place.
Elles ont entraîné la démission du Premier ministre Robert Fico, qui reste cependant chef de Smer-SD et proche allié du Premier ministre actuel.
Jusqu'à présent, cinq personnes ont été interpellées dans l'affaire du meurtre, dont son commanditaire présumé - un multimillionnaire qui entretiendrait des liens avec Smer-SD.
Jeudi, le Parlement européen a appelé la Slovaquie à poursuivre l'enquête "y compris sur toutes les connexions politiques possibles".
Les députés européens se sont aussi déclarés "préoccupés par les présomptions de corruption, de conflits d'intérêts, d'impunité et de (système de) portes tournantes dans les cercles du pouvoir slovaque".
Comparée à Macron
Lundi, la candidate libérale a reçu le soutien de Jozef Kuciak, frère du journaliste assassiné. "Je voterai certainement pour Mme Caputova. Je ne voterai pas pour une personne soutenue par des oligarques et leurs gens qui m'ont privé de mon frère et de ma belle-soeur", a-t-il écrit sur sa page Facebook.
Les analystes comparent Mme Caputova au président français Emmanuel Macron, un autre outsider qui a accédé au pouvoir en 2017 avec un programme réformiste.
"Une histoire similaire s'est déroulée lors des dernières élections présidentielles en France, où le représentant d'une nouvelle tendance politique et un nouveau mouvement politique ont triomphé", a déclaré à l'AFP Aneta Vilagi.
Les promesses électorales de la candidate libérale, divorcée et mère de deux enfants, incluent la protection de l'environnement, le soutien aux personnes âgées et la justice pour tous.
"J'ai l'intention d'initier activement des changements systémiques qui priveraient les procureurs et la police de toute influence politique", a déclaré à l'AFP Mme Caputova.
M. Sefcovic a pour sa part promis des avantages sociaux plus importants pour les personnes âgées et les jeunes familles, le renforcement de la politique industrielle et une revitalisation du secteur agricole du pays.
Démocrates, pro-européens
Les deux candidats à la présidence slovaque sont démocrates et ouvertement pro-européens, ce dont s'est félicité le chef de l'Etat sortant, Andrej Kiska.
"Croyez-moi, beaucoup de pays nous l'envient", a-t-il dit mercredi.
M. Kiska a soutenu ouvertement Mme Caputova, alors que le Premier ministre Peter Pellegrini a exprimé son soutien à M. Sefcovic en appelant à choisir "un président expérimenté".
Edita Sladkova, enseignante, partage son opinion. "Sefcovic est un homme instruit qui parle couramment trois langues étrangères. Il est ouvert d'esprit et érudit dans tous les domaines. C'est un véritable diplomate", a-t-elle déclaré à l'AFP.
"Mon cœur me dit qu'il est un homme bon et qu'il serait un bon président. Il a donc toute ma confiance", a déclaré quant à elle Anna Kutisova, une retraitée de 78 ans de Nitra (ouest).
Le gynécologue Michal Lunicek, 52 ans, soutient, lui, Mme Caputova. "Parce que Sefcovic est lié à un parti qui est absolument inacceptable pour moi", explique-t-il.
Le président slovaque ne gouverne pas, mais il ratifie les traités internationaux et nomme les plus hauts magistrats. Il est aussi commandant en chef des forces armées et dispose du droit de veto.
Les bureaux de vote fermeront à 21h00 GMT.
Le nouveau président prêtera serment le 15 juin.
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