Le tribunal de commerce de Nanterre a prononcé vendredi la liquidation judiciaire d'Arjowiggins Papiers Couchés à Bessé-sur-Braye (Sarthe), qui emploie 580 personnes, et la cession partielle de celle du Bourray (270 emplois), à Saint-Mars-La-Brière près du Mans.
"Il y a 800 salariés touchés directement, sans compter les emplois indirects. Il y a eu des liquidations qui ont touché autant de salariés mais autant dans un même département et une même zone géographique, c'est vraiment inédit", a souligné l'avocat des salariés Thomas Hollande. "C'est une catastrophe pour le département de la Sarthe", a-t-il ajouté, faisant part de sa "colère" vis-à-vis de l'État.
Pour l'usine de Bessé-sur-Braye, fondée en 1824, le tribunal a prononcé "la liquidation judiciaire sans poursuite d'activité", a expliqué Me Hollande. Pour l'usine du Bourray, il s'agit d'une cession partielle "avec le licenciement de plus de 150 salariés", selon la même source.
Quant à la troisième société de Greenfield à Château-Thierry (Aisne, 75 salariés), elle est entièrement reprise, selon la même source.
A Bessé-sur-Braye, des salariés bloquaient vendredi les sorties de camions en plaçant des bobines papiers devant les entrées du site, selon un journaliste de l'AFP. Une cinquantaine de personnes étaient réunies dans la cour intérieure dans une ambiance d'enterrement. Alain, 58 ans et 35 ans d'usine, faisait part de "son dégoût". "Tout le monde nous a abandonnés, on s'est fait rouler dans la farine", a-t-il lâché.
"On s'y attendait mais là c'est cuit. C'est le coup de massue", a déclaré à l'AFP Abraham Philippe, représentant CGT à Bessé-sur-Braye (580 salariés), avant même l'annonce officielle. "Y a plus qu'à chercher du boulot...".
"Coup très dur"
"Il va y avoir 600 personnes dans la région sans emploi et il n'y a rien dans le secteur", a déploré Christine, employée à la logistique, chez "Arjo" depuis 35 ans, parlant d'un "coup très dur".
"Il y a une heure de route minimum pour les grandes villes, Blois, Tours ou Le Mans. On a du mal à réaliser que c'est fini", a-t-elle dit.
"Tout le monde est sous le choc", a abondé Jacques Lacoche, le maire de Bessé-sur-Braye (2.200 habitants). "Il y a toujours un espoir de repreneur même après la liquidation judiciaire", a-t-il toutefois affirmé.
"C'est possible mais j'ai du mal à y croire", a commenté Abraham Philippe.
Le besoin de financement pour reprendre l'usine de Bessé s'élevait à 40 millions d'euros, selon Thomas Hollande, avocat des salariés, la région s'étant dit prête à apporter 20 millions d'euros.
Selon l'avocat, l'État, la Banque publique d'investissement (BPI) et les dirigeants du groupe "sont responsables de cette situation alors qu'il y avait un projet de reprise viable proposé". Ils "ont refusé de le financer intégralement", a estimé Me Hollande.
Les trois usines, qui appartenaient au groupe Sequana, ont été placées en redressement judiciaire le 8 janvier. Bpifrance est actionnaire de Sequana à hauteur de 15,4% du capital et détient 17,2% des droits de vote.
"C'est une nouvelle difficile pour le territoire (...). Malheureusement, les financements privés nécessaires pour équilibrer l'offre n'ont pu être réunis", a réagi le ministère de l'Économie dans un communiqué. "L'Etat sera aux côtés des collectivités locales pour accompagner et reclasser les salariés", a-t-il ajouté.
"La région est aux côtés des salariés d'Arjowiggins depuis le début, elle ne les abandonnera pas !", a lancé Christelle Morançais, présidente (LR) du conseil régional des Pays de la Loire dans un communiqué de presse, en annonçant la mobilisation de "tous ses moyens" pour que ces derniers "retrouvent un emploi dans les plus brefs délais".
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