Un mois après le désistement du groupe franco-belge Altifort, qui a fait l'effet d'une douche froide, les 281 salariés du site sont suspendus à cette nouvelle décision de justice dans ce feuilleton devenu un marqueur de la politique industrielle du quinquennat Macron.
Lundi, trois offres de reprise et deux marques d'intérêt ont été déposées auprès des organes en charge de la procédure, encore assorties à ce stade de conditions suspensives.
De source proche du dossier, deux d'entre elles sont jugées particulièrement crédibles : celles du sidérurgiste britannique British Steel et du spécialiste italien des aciers spéciaux Calvi Networks, qui prévoient la reprise totale de l'activité et du personnel.
Ces projets "sont cohérents, il va maintenant falloir qu'ils soient présentés au tribunal de façon complète, autant en termes commercial, industriel que financier", affirme à l'AFP Nacim Bardi, délégué syndical CGT, précisant que le personnel doit rencontrer prochainement ces repreneurs potentiels.
Une troisième offre, déposée par le fonds SecuFund Industry et portée par l'ancien patron d'Ascometal Franck Supplisson, prévoit une reprise partielle des salariés et une modification de l'activité. Les marques d'intérêt ont été formulées via des lettres d'intention par l'industriel régional Pascal Cochez et par un groupe hollandais souhaitant disposer de plus de temps pour étudier le dossier.
Lundi, la secrétaire d'Etat à l'Economie Agnès Pannier-Runacher s'est réjouie de voir des "gens très sérieux" porter ces projets de reprise, "un beau signal pour les salariés et les familles qui sont derrière". "Mais ne vendons pas la peau de l'ours avant de l'avoir tué !", a-t-elle averti.
- "Ambiance lourde" -
D'après une source proche des discussions, le tribunal de grande instance de Strasbourg devrait accorder un délai supplémentaire de "quelques semaines", peut-être jusqu'à "courant mai", pour se prononcer.
Le personnel, lui, demande à ce que la prolongation ne dépasse pas quatre semaines. "Les salariés n'en peuvent plus, ils ne veulent plus vivre dans l'incertitude", explique M. Bardi.
Créée en 1975 par Vallourec et devenue Ascoval en 2017, l'aciérie de Saint-Saulve attend un repreneur depuis la liquidation judiciaire en février 2018 du groupe Asco Industries, auquel le sidérurgiste Vallourec avait cédé 60% de l'usine, tout en conservant 40% des engagements de commandes.
Mi-décembre, le tribunal de Strasbourg avait mis fin à un long suspense en validant la reprise de l'usine par Altifort. Mais, à la surprise générale, le projet a échoué en février, le groupe franco-belge n'ayant pas réussi à réunir les 35 millions d'euros qu'il s'était engagé à apporter. Le tribunal de Strasbourg avait alors accordé un nouveau sursis d'un mois à l'aciérie.
"L'intérêt porté à l'usine d'Ascoval, quelques semaines seulement après l'échec du projet d'Altifort, confirme la qualité et l'intérêt de cette usine", estime Bercy, qui salue "l'attitude très responsable du personnel de l'aciérie".
"L'Etat, la région des Hauts-de-France et les collectivités locales vont travailler rapidement avec l'administrateur judiciaire pour permettre à ces offres préliminaires de devenir des offres fermes", assure Bercy.
D'ici là, l'usine est en sous-activité depuis vendredi et jusqu'au 15 avril, toutes les commandes ayant été honorées.
"L'ambiance était lourde" ces dernières semaines mais "ce qui est encourageant, c'est que notre dossier intéresse les industriels. C'est un nouvel espoir", déclare un salarié proche de la direction à l'AFP.
"Les salariés sont fatigués. On est tous à bout", confie pour sa part Nicolas Lethellier, délégué CGT. "On a envie que ça se termine, cette situation dure depuis trop longtemps."
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