Alors que l'avionneur procède à des essais en vol pour tester une version corrigée du système anti-décrochage MCAS équipant la flotte des 737 MAX --mis en cause dans ces accidents-- les parlementaires américains ont convoqué des dirigeants des autorités de sécurité aérienne pour faire la lumière sur les conditions de certification de cet appareil, entré en service il y a moins de deux ans.
Un 737 MAX 8 de la compagnie indonésienne Lion Air s'était abîmé le 29 octobre en mer de Java tuant 189 personnes avant qu'un même avion d'Ethiopian Airlines ne s'écrase près d'Addis-Abeba le 10 mars, faisant 157 victimes.
Le témoignage de Dan Elwell, le responsable par intérim de l'agence fédérale de l'aviation (FAA), est particulièrement attendu alors que l'autorité a été vivement critiquée pour avoir tardé à prendre la décision de suspendre la flotte des MAX après la tragédie d'Ethiopian.
Des soupçons de collusion entre l'agence américaine et l'avionneur américain ont alors émergé.
La FAA, qui a délégué une partie du travail de certification à Boeing, "a été directement impliquée" dans l'approbation du MCAS (Maneuvering Characteristics Augmentation System), va affirmer Dan Elwell selon un discours préparé en amont dont l'AFP a obtenu une copie.
"Des ingénieurs de la FAA et des pilotes d'essais ont été impliqués dans l'évaluation opérationnelle du MCAS", va-t-il dire, tout en expliquant que "comme c'est toujours le cas dans la certification de nouveaux produits, ce sont les données dans le temps qui permettent d'analyser en continu (le système) et de l'améliorer".
Il va toutefois concéder que face à des systèmes toujours plus complexes, "l'approche de la FAA en matière de supervision doit évoluer" si l'agence veut demeurer un leader de la sécurité aérienne.
De son côté Boeing est lancé dans une course contre la montre pour obtenir une nouvelle autorisation de faire voler les 737 MAX.
Des essais en vols pour tester une version corrigée de ce système se sont déroulés lundi après des tests sur simulateurs de vol effectués samedi à Renton (Washington, ouest) par des pilotes d'American Airlines et Southwest, deux compagnies clientes du 737 MAX, ont précisé à l'AFP mardi deux sources proches du dossier, sous couvert d'anonymat.
Le MCAS, qui met l'avion en piqué quand cela est nécessaire pour lui permettre de reprendre de la vitesse et l'éloigner du risque de décrochage fatal, avait été développé spécialement pour le 737 MAX dont les moteurs sont plus lourds que ceux du traditionnel 737 NG.
Boeing n'a toutefois pas encore transmis le correctif à la FAA, censée le certifier avant de lever la suspension de vol, a indiqué à l'AFP une source gouvernementale.
La sécurité, "priorité absolue"
Parmi les changements apportés par Boeing, le MCAS ne pourra plus effectuer des opérations répétées quand le pilote s'efforce de reprendre la main et sera automatiquement déconnecté en cas de désaccords entre deux sondes d'incidence ("Angle of attack", AOA), ont expliqué à l'AFP deux autres sources proches du dossier.
Ceci est un changement majeur car jusqu'à l'accident d'Ethiopian Airlines, le MCAS était paramétré pour suivre les informations d'une seule sonde à la fois.
D'après les premiers éléments de l'enquête concernant Lion Air, une des deux sondes d'incidence AOA était tombée en panne mais elle avait continué à transmettre des informations aux calculateurs, notamment au MCAS.
Le pilote sera en outre capable de déduire que le MCAS ne fonctionne plus grâce à un système d'alerte lumineux, baptisé "AOA disagree", indiquant que les deux sondes émettent des données contradictoires.
Boeing a informé les compagnies clientes du 737 MAX qu'elles pouvaient commander le correctif, désormais gratuit. Celui-ci sera installé ultérieurement sous réserve qu'il obtienne sa certification.
Mais autre coup dur pour cet appareil: mardi, lors d'un incident séparé, un Boeing 737 MAX de la compagnie Southwest, qui était convoyé vers la Californie pour y être parqué, a dû atterrir d'urgence en Floride à cause d'un problème de moteur. Il n'y avait aucun passager à bord hormis le pilote et son co-pilote.
Mercredi, Dan Elwell assurera que la FAA n'autorisera pas le Boeing 737 MAX à reprendre les airs tant que toutes les données techniques et l'analyse des événements ne démontreront pas qu'il est "approprié" de le faire.
"Nous allons suivre de très près les auditions de mercredi", a réagi Boeing avant les auditions. "La sécurité est notre priorité absolue lorsque nous concevons, fabriquons, livrons et faisons la maintenance de nos avions", a ajouté l'avionneur.
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