Dans son modeste pavillon de Toulon, la septuagénaire, entourée de photos noir et blanc de son défunt mari et d'extraits de journaux jaunis relatant le tragique événement, n'a oublié aucun détail de ce samedi 27 janvier 1968.
Ce jour-là, Thérèse Scheirmann-Descamps, mère de deux enfants de 5 et 3 ans, prépare un gâteau pour son époux Jules qui doit fêter ses 29 ans le jour-même, dès le pied posé sur la terre ferme.
"D'habitude il était de retour à 08H00, je l'ai attendu toute la matinée, lorsqu'à midi un marin en uniforme a sonné à ma porte et m'a dit qu'il aurait du retard", évoque la pimpante septuagénaire.
"J'ai tout de suite compris que je ne le reverrai jamais, j'ai été foudroyée", poursuit la veuve, hantée par ce qu'à pu ressentir son époux dans ses derniers instants.
L'enquête établira que le sous-marin, alors en exercice au large de Toulon avec 52 hommes à son bord, a coulé en 4 minutes.
Des recherches sont entreprises pour retrouver l'épave engloutie mais elles seront rapidement mises de côté, laissant familles et marins sans réponse. "Tous les dix ans, je me disais qu'elles allaient reprendre et puis rien", commente Mme Scheirmann-Descamps.
Il faudra attendre plus de 50 ans après la disparition du sous-marin pour que la reprise des recherches soit annoncée par la ministre des Armées Florence Parly en février 2019.
"La découverte du sous-marin argentin San Juan en novembre 2018, plus d'un an après sa disparition, a joué en notre faveur", avance Hervé Fauve, le fils du commandant de la Minerve disparu avec ses hommes.
- "Cela reste très compliqué" -
"Quand on meurt pour une cause, c'est important d'aller jusqu'au bout, on leur doit ça", poursuit celui qui, grâce à son site internet consacré à la catastrophe, a réussi à fédérer les familles après un demi-siècle de silence.
"Cette annonce de reprise des recherches, c'est un miracle", abonde Jacques Dannay. "Rongé" par la perte de son père alors qu'il n'avait que deux ans, le quinquagénaire a longtemps espéré qu'un jour on lui annonce son retour: "Je sais que c'est idiot, mais pour moi, mon père n'est pas mort tant qu'on n'aura pas retrouvé l'épave. Si on me disait qu'il était vivant je le croirais".
Fin février, un navire de l'Ifremer équipé notamment d'un sondeur et de drones a permis de quadriller la zone présumée de la disparition. En juillet, les investigations reprendront dans les zones identifiées, cinq mois plus tôt afin d'y relever des indices. Puis viendra à partir du 18 novembre, la troisième phase, la plus cruciale, au cours de laquelle le sous-marin habité le Nautile, pourra ou non confirmer la présence de la Minerve.
"Si les recherches reprennent, c'est parce que l'on pense que l'on a des chances de le retrouver, mais il faut rester prudent. Les moyens sont plus performants qu'à l'époque, mais par plus de 2.000 mètres de profondeur cela reste très compliqué", tempère le lieutenant de vaisseau Nicolas Conort, porte-parole de la préfecture maritime.
Pour les familles, la possibilité d'avoir enfin un lieu où se recueillir et d'avoir peut-être des explications sur les causes du naufrage toujours inconnues n'ont jamais été aussi proches. "On veut qu'ils sachent qu'on ne les a pas oubliés", insiste Jacques Dannay.
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