Un an et demi après un premier procès marqué par de virulentes passes d'armes entre défense et parties civiles, la douleur des familles des victimes était intacte mais l'atmosphère moins tendue.
"C'est dur d'être là. On espère que cette fois la justice ira jusqu'au bout et condamnera le frère de l'assassin pour complicité, parce qu'il est complice. Ce sont des monstres", a déclaré à la presse Samuel Sandler, qui a perdu son fils Jonathan et deux petits-enfants.
Symbole des failles du renseignement et annonciatrice d'une refonte de l'antiterrorisme en France, l'affaire Merah ramène à ce moment de basculement en 2012 où la France est pour la première fois frappée sur son sol par un attentat jihadiste depuis ceux du GIA algérien en 1995.
Après un premier procès dans un contexte de menace terroriste et dans une France traumatisée par une vague d'attentats sans précédent, ce second acte se tient après la chute du "califat" des jihadistes de l'Etat islamique.
En première instance, la cour d'assises spéciale de Paris avait condamné Abdelkader Merah, aujourd'hui âgé de 36 ans, à la peine maximale pour association de malfaiteurs terroriste criminelle, mais l'avait acquitté du chef de complicité des sept assassinats perpétrés les 11, 15 et 19 mars 2012 à Toulouse et Montauban par son frère Mohamed.
L'enjeu principal du nouveau procès sera de déterminer le rôle exact joué par Abdelkader Merah dans les tueries exécutées en solo par son frère, au volant d'un puissant scooter volé.
L'homme, entré dans le box en chemise blanche et barbe noire, cheveux noués en catogan, se présente comme un ancien "peintre en bâtiment". Visage impénétrable, concentré, il est tourné vers la cour.
À ses côtés comparaît un délinquant, Fettah Malki, ex-pizzaïolo de 36 ans, condamné en premier ressort à 14 ans de prison pour association de malfaiteurs terroriste criminelle pour avoir fourni à Mohamed Merah un gilet pare-balles, un pistolet-mitrailleur et des munitions.
L'accusation, qui avait requis la perpétuité contre le grand frère du tueur, présenté comme son "mentor", avait fait appel.
"Eléments de preuve"
Il va falloir revivre ces crimes, au rythme de la déambulation meurtrière de Mohamed Merah: un récit que la présidente de la cour Xavière Siméoni a entrepris de faire avant de se pencher sur la personnalité des accusés.
Elle relate l'assassinat de militaires, visés du fait de l'engagement de la France en Afghanistan - Imad Ibn Ziaten, 30 ans, Abel Chennouf, 25 ans, et Mohamed Legouad, 23 ans - et les 36 secondes du massacre de l'école Ozar Hatorah où Mohamed Merah est venu tuer des juifs pour ce qu'ils sont.
A l'entrée, il tue d'abord Jonathan Sandler, 30 ans, professeur de religion, et ses fils Arié et Gabriel, 5 et 3 ans. Dans la cour, il fait feu sur une petite fille à terre, Myriam Monsonégo, 8 ans, la fille du directeur d'école.
Retranché dans son appartement, le tueur sera abattu le 22 mars par le Raid après 32 heures de siège suivies par les médias du monde entier. Dans un courrier retrouvé après sa mort, le jihadiste se félicite d'avoir insufflé la terreur dans "le coeur des ennemis d'Allah".
Serrés sur les bancs du public, les familles écoutent sans ciller. Elles attendent de voir reconnue la pleine responsabilité d'Abdelkader dans les crimes de son frère. "Il y a des éléments de preuve", a affirmé Me Simon Cohen, qui défend la majorité des plus de 200 parties civiles.
La première vérité judiciaire dans cette affaire a établi que Mohamed Merah avait "toujours été seul" au moment des assassinats. Et "s'il partageait bien les motivations" du jihadiste, "aucun élément de la procédure ne montre" qu'Abdelkader Merah "connaissait les objectifs visés et les crimes commis par son frère", indiquait la cour en première instance.
La défense, qui a refusé de s'exprimer avant le début du procès, n'avait eu de cesse de mettre en garde contre la tentation de juger un fantôme à travers Abdelkader Merah.
Le verdict sera rendu le 18 avril.
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