La mort d'un Allemand de 35 ans, instrumentalisée par des groupes d'extrême droite en quelques heures, avait conduit à des violences qui avaient choqué l'Allemagne, et à des "chasses à l'étranger" dénoncées par Angela Merkel.
Par crainte de nouveaux dérapages, le procès ne se déroule pas à Chemnitz. Les mouvements extrémistes y restent bien implantés, à l'instar de ces hooligans du club local de 4e division impliqués dans les heurts en août, et qui doivent se rassembler lundi par centaines, selon l'agence de presse DPA, pour enterrer l'un des leurs.
C'est à Dresde, également en Saxe, dans une salle spéciale du Palais de justice et sous haute surveillance policière que comparaîtra un Syrien de 23 ans présenté comme Alaa S. Il sera séparé du public par une vitre sécurisée.
C'est au même endroit qu'avaient été condamnés les néo-nazis du groupe "Freital" pour avoir attaqué des foyers de réfugiés en 2015, en plein pic d'immigration. Plus d'un million de demandeurs d'asile sont arrivées en Allemagne cette année-là et la suivante.
Zones d'ombre
Le Parquet de Chemnitz accuse le jeune homme, qui travaillait comme coiffeur dans cette ville, de meurtre et tentative de meurtre en réunion.
D'après l'acte d'accusation, à la suite "d'une dispute dont l'origine reste inconnue", Alaa S. et un Irakien de 22 ans, Farhad R.A., toujours en fuite et considéré comme le principal auteur des faits, ont poignardé le 26 août Daniel H., 35 ans, quatre fois dans la poitrine et une fois dans le bras. La victime est décédée sur place.
Ils sont aussi accusés d'avoir blessé d'un coup de couteau dans le dos Dimitri M., un ami du défunt.
Le parquet dit avoir recueilli une centaine de témoignages. Mais selon plusieurs médias allemands, les preuves contre le Syrien sont en fait ténues: l'accusation s'appuierait essentiellement sur un témoignage et ne disposerait d'aucune trace d'ADN incriminant l'accusé.
"Pas d'empreinte, pas de fibres, pas de cheveux, pas de vidéo. Pas d'éléments de preuves. Juste une série de témoignages contradictoires", affirme notamment l'hebdomadaire Die Zeit.
- "Haine dans la rue"-
Le meurtre avait très vite été utilisé par des groupuscules de droite radicale pour attiser la xénophobie et mobiliser dans la rue.
Des hooligans avaient ainsi organisé dans les heures ayant suivi le meurtre de premières protestations émaillées de violence. Des étrangers avaient été insultés et pris en chasse.
Puis c'est l'Alternative pour l'Allemagne (AfD), parti d'extrême droite qui a fait une entrée fracassante au Bundestag lors des élections de 2017, qui avait organisé des manifestations, où certains participants avaient fait le salut hitlérien.
Ces images avaient choqué l'opinion allemande, et fait le tour du monde. La chancelière avait dénoncé des "chasses à l'étranger" et la "haine dans la rue".
D'autres ont tenté de se rebiffer. Un grand concert a eu lieu contre le racisme. Début mars encore, plusieurs associations ont organisé leur traditionnelle journée de la paix, pour "montrer que Chemnitz est une ville accueillante".
Mais la démonstration des hooligans début mars, scandant des slogans néo-nazis dans le stade de foot de Chemnitz, a montré "a qui appartient la ville", d'après le journal Süddeutsche Zeitung.
Craignant une ambiance délétère, la défense d'Alaa S. avait demandé qu'il soit jugé non seulement loin de Chemnitz, mais hors de Saxe, où des élections auront lieu en septembre, avec l'AfD est en très bonne position. La cour fédérale de Karlsruhe n'a pas suivi.
Le procès doit durer au moins jusqu'au 29 octobre.
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