Fin décembre, le président palestinien avait annoncé vouloir dissoudre le Parlement palestinien contrôlé par le Hamas et organiser des élections dans les six mois. Un mois plus tard, le précédent Premier ministre palestinien, Rami Hamdallah, remettait sa démission.
Ces annonces et la nomination de Mohammad Chtayyieh, un des fidèles du président palestinien, à la tête du gouvernement, sont perçues par les analystes comme une manière pour Mahmoud Abbas d'écarter encore davantage le Hamas qui contrôle Gaza.
Ce dernier a annoncé dimanche qu'il ne reconnaissait "pas le gouvernement séparatiste car il a été formé sans consensus national".
Le porte-parole du Hamas, Fawzi Barhoum, a dénoncé dans un communiqué un nouveau gouvernement qui "reflète l'unilatéralisme d'Abbas et son monopole du pouvoir", mettant en garde contre la volonté du président palestinien de séparer la bande de Gaza de la Cisjordanie occupée.
Le gouvernement est l'émanation de l'Autorité palestinienne, entité intérimaire internationalement reconnue et censée préfigurer un Etat indépendant qui comprendrait la Cisjordanie et la bande de Gaza, séparées de quelques dizaines de kilomètres par le territoire israélien. Mais dans les faits, c'est le président palestinien qui prend les décisions importantes.
L'Autorité palestinienne n'exerce plus son pouvoir, limité par l'occupation israélienne, que sur des fragments de Cisjordanie, territoire occupé par Israël depuis plus de 50 ans.
Paysage politique figé
En 2014, la nomination du précédent gouvernement s'était faite lors d'une phase de réconciliation entre le Hamas et le Fatah. Le cabinet ainsi formé était composé de personnalités indépendantes que les deux mouvements avaient acceptées, avant que le rapprochement ne vole en éclat.
Le nouveau gouvernement que devra annoncer M. Chtayyieh dans les prochaines semaines est lui au contraire le fruit de l'échec des négociations entre le parti laïc du président palestinien et le mouvement islamiste.
"Si le Hamas ne veut pas de la réconciliation, si le Hamas ne veut pas d'élections, si le Hamas veut toujours former avec d'autres un mini-Etat à Gaza pour les Frères musulmans, si c'est leur stratégie, nous devons mettre fin à la relation. C'est pourquoi nous devons former un nouveau gouvernement", avait ainsi déclaré Nabil Abou Roudeinah, le porte-parole du président palestinien le mois dernier.
En 2006, le Hamas a remporté les élections législatives palestiniennes mais la communauté internationale a refusé de reconnaître cette victoire.
Un an plus tard, le mouvement islamiste prenait le contrôle de la bande de Gaza au terme d'une quasi-guerre civile avec le Fatah.
Depuis, tous les efforts de réconciliation entre les deux frères ennemis palestiniens ont échoué, figeant le paysage politique: le Parlement ne siège pas et le président Mahmoud Abbas, dont le mandat a expiré depuis 2009, dirige toujours l'Autorité palestinienne, faute d'élections.
En 2018, M. Hamdallah avait essuyé un attentat contre son convoi lors d'une rare visite à Gaza. Il s'en était sorti indemne.
M. Abbas a pris une série de mesures de rétorsion pour tenter de forcer, en vain, le Hamas à remettre les rênes du pouvoir à l'Autorité palestinienne à Gaza. Pour des observateurs, ces mesures attisent les tensions dans l'enclave, qui a frôlé une nouvelle guerre avec Israël en 2018.
L'Autorité s'inquiète d'être mise à l'écart en voyant des acteurs internationaux, face à l'acuité de la situation à Gaza, traiter avec le Hamas.
Elle s'alarme également de la disjonction grandissante entre la Cisjordanie et Gaza et du risque que cet éloignement fait peser sur la création d'un Etat palestinien comprenant les deux territoires, même si les négociations de paix avec Israël sont inexistantes depuis des années.
L'Autorité, au sein de laquelle le président n'a pas de réelle opposition, est largement discréditée auprès des Palestiniens qui lui reprochent corruption et incapacité à mettre fin à l'occupation israélienne.
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