Avec son Renault Trafic à la carrosserie imitation rouille dans le style "rat's look", Sébastien Cherrier, 44 ans, est venu s'installer sur la place du village de Villequiers, une commune de 483 habitants située à l'est de Bourges.
Ancien éducateur spécialisé devenu brocanteur, le bistrotier à l'allure de biker, crâne rasé, longue barbe et boucle d'oreille, est titulaire d'une licence 3. Le service se fait directement au bar, ouvert de 18H00 à 22H00.
Chaque soir de la semaine, son bar-truck marron-blanc dénommé "C'est l'occaz" stationne dans un village différent: le lundi Précy, 350 habitants, le mardi, Azy, 450 habitants, le mercredi, Rians, 1000 habitants, le jeudi Etréchy, 450 habitants... Les lieux sont annoncés sur une page Facebook dédiée, où Sébastien poste bon nombre de photos et recense les reportages que les médias lui ont consacrés, y compris la BBC.
Pour les habitants, qui voient de plus en plus disparaître les petits commerces, et en particulier les cafés, l'arrivée de ce camion-bistrot dans leur commune est plutôt vécue comme une bénédiction. Une quinzaine se sont déplacées ce vendredi soir: des retraités, des trentenaires avec enfants, mais aussi des amis de Sébastien venus soutenir sa démarche.
"Le concept est super. Les bistrots d'autrefois permettaient de se rencontrer. Il a fallu que je vienne au +bar truck+ pour vraiment faire connaissance avec mes voisins. Jusqu'alors, c'était juste +bonjour, bonsoir+. Maintenant, on se connaît mieux", témoigne Olivier, un artisan d'une cinquantaine d'années.
"Tous fermés"
A l'intérieur du véhicule, deux frigos pour tenir au frais les boissons. Vin, bière, sodas, eau, ainsi que thé et café... le choix est présenté sur des cadres installés sur les portes arrière ouvertes du véhicule. Le bar, offert par un ébéniste, a été confectionné dans du chêne. Une cassette audio posée sur le comptoir sert de supports à sucettes. Derrière le camion, trois tables de jardin rouge et vertes ont été disposées, ainsi qu'un barnum pour protéger de la pluie.
Le maire du village Pascal Méreau voit dans cette initiative une "chance" pour sa commune, rappelant que "le dernier café a fermé il y a un plus d'un an alors qu'il y en avait encore quatre en 1985". "Nous n'avons plus qu'un seul commerce qui fait épicerie, bar, chambre d'hôte", regrette l'élu, également professeur des écoles.
L'air jovial, Sébastien Cherrier se positionne comme un défenseur de la ruralité. "Cela faisait longtemps que l'idée me trottait dans la tête", raconte le quadragénaire, qui a ouvert "C'est l'occaz" en plein hiver, il y a quelques semaines. "En tant que brocanteur, je traverse beaucoup de villages aux alentours de Sancerre et je suis atterré par le nombre de commerces qui ont baissé le rideau, en particulier les bistrots, où l'on pouvait encore s'arrêter il y a une trentaine d'années, se souvient-il.
"Maintenant, c'est fini, ils sont tous fermés. Les gens sont scotchés devant la télé, sur leurs tablettes et leurs téléphones portables. Il n'y plus d'échanges, c'est dramatique. Il ne faut pas s'étonner que ça aille mal. Nous n'avons plus d'endroits pour parler le soir après une journée de travail", regrette le patron, qui espère pouvoir se dégager un salaire avec l'arrivée des beaux jours.
Selon le baromètre 2017 France Boissons/Crédoc, la France est passée de 200.000 cafés en 1960 à 36.000 en 2015. Les fermetures ont majoritairement lieu en milieu rural et périurbain.
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