En l'absence du primat des Gaules, la présidente du tribunal correctionnel de Lyon Brigitte Vernay l'a "déclaré coupable de non-dénonciation de mauvais traitements" envers un mineur entre 2014 et 2015.
Mgr Barbarin devient ainsi le troisième évêque condamné en France pour des faits similaires, après deux autres en 2001 et en 2018.
Le jugement, dont l'AFP a obtenu une copie, est très sévère à son égard: "alors même que ses fonctions lui donnaient accès à toutes les informations et qu'il avait la capacité de les analyser et les communiquer utilement, Philippe Barbarin a fait le choix en conscience, pour préserver l'institution à laquelle il appartient, de ne pas les transmettre à la justice".
"En voulant éviter le scandale, causé par les faits d'abus sexuels multiples commis par un prêtre, mais sans doute aussi par la mise à jour de décisions bien peu adéquates prises par les évêques qui le précédaient, Philippe Barbarin a préféré prendre le risque d'empêcher la découverte de très nombreuses victimes d'abus sexuels par la justice, et d'interdire l'expression de leur douleur", poursuit le jugement.
La procureure Charlotte Trabut n'avait pourtant pas requis de peine à l'encontre de l'archevêque, ni des cinq anciens membres du diocèse poursuivis avec lui, conformément à la décision initiale du parquet de classer l'affaire.
Les avocats du prélat ont immédiatement annoncé faire appel.
"La motivation du tribunal ne me convainc pas. Nous allons donc contester cette décision par toutes les voies de droit utiles", a indiqué Jean-Félix Luciani, en relevant qu'il "était difficile pour le tribunal de résister à une telle pression avec des documentaires, un film... Ça pose de vraies questions sur le respect de la Justice", a relevé l'avocat.
Pour les cinq autres prévenus, le tribunal a considéré que les faits étaient, selon les cas, soit pas constitués soit prescrits et n'a donc pas prononcé de condamnation à leur encontre.
Pour Yves Sauvayre, l'un des avocats des parties civiles, "le souffle donné dans cette audience a eu des conséquences". "La responsabilité et la culpabilité du cardinal ont été consacrés par ce jugement. C'est un symbole extraordinaire. Une grande émotion historique", a-t-il relevé.
"entendues, écoutées, reconnues"
L'un des plaignants, François Devaux, cofondateur de l'association de victimes La Parole libérée, a lui salué "une grande victoire pour la protection de l'enfance".
"Cette victoire envoie un signal très fort à beaucoup de victimes et leur permet de comprendre qu'elles sont entendues, écoutées et reconnues", a-t-il ajouté.
"Je n'ai aucune surprise, j'étais persuadé qu'on aurait ce résultat compte tenu de ce qui s'est dit à l'audience. Cela montre que tout ce qu'on dénonce depuis quatre ans, ça existait vraiment", estime de son côté un autre plaignant Pierre-Emmanuel Germain-Thill.
L'audience de début janvier avait marqué les esprits, tant le prélat incarne depuis trois ans en France la crise de l'Église face à la pédophilie, qui vient de faire l'objet d'un sommet inédit de la hiérarchie catholique au Vatican.
L'affaire lyonnaise a eu un écho retentissant avec, dernier événement en date, le film de François Ozon "Grâce à Dieu", en référence à une expression maladroite du cardinal Barbarin.
"Je n'ai jamais cherché à cacher, encore moins à couvrir ces faits horribles", avait assuré au tribunal le prélat de 68 ans, expliquant n'avoir appris les agressions reprochées au père Bernard Preynat qu'en 2014, quand une victime se confia à lui.
Le procès de Bernard Preynat est lui attendu en fin d'année.
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