Le tribunal de Tokyo a annoncé mardi qu'il acceptait sa remise en liberté moyennant le versement d'une caution d'un milliard de yens (8 millions d'euros).
Son avocat devrait déposer cette somme au tribunal mercredi dans la matinée, déclenchant ainsi la procédure de libération de l'ex-PDG de Renault et Nissan accusé de malversations financières.
L'appel interjeté par le procureur a été rejeté mardi dans la soirée, selon les médias japonais.
Il est très rare au Japon qu'une personne inculpée pour abus de confiance soit libérée avant que ne soit connue la date de son procès ou même avant qu'il n'ait débuté.
Les experts expliquent que le nouvel avocat de M. Ghosn a vraisemblablement offert des garanties qui ont convaincu le juge que le magnat franco-libanais-brésilien serait dans l'incapacité totale de détruire des preuves ou de quitter le pays.
"Procès équitable"
Afin d'arracher l'approbation du juge, Junichiro Hironaka, nouvel avocat japonais de M. Ghosn qui a remplacé Motonari Otsuru, un ancien procureur, il y a moins d'un mois, a suggéré que son illustre client soit placé sous la surveillance de caméras et dispose de moyens limités de communication avec l'extérieur.
"Nous avons proposé un dispositif qui rend impossible une évasion ou la suppression d'informations", a insisté mardi Me Hironaka, réputé pour avoir obtenu l'acquittement de plusieurs clients de haute volée.
Dans un communiqué, M. Ghosn s'est dit "infiniment reconnaissant" envers ses amis et sa famille pour le soutien qu'ils lui ont apporté.
"Je suis innocent et résolument déterminé à me défendre vigoureusement dans un procès équitable contre ces accusations sans fondement", a-t-il ajouté.
Son avocat japonais a suggéré que M. Ghosn donne une conférence de presse dès que possible.
En théorie, le bureau du procureur a encore la possibilité de l'arrêter à nouveau sur d'autres chefs d'accusation, selon des juristes, mais cette probabilité semble réduite désormais.
"J'espère que le procureur, qui semble en faire une affaire personnelle, n'ira pas utiliser ce stratagème", a réagi sur la radio française RTL l'avocat français de l'ancien PDG, Jean-Yves Le Borgne. "Les faits de ce dossier sont tels, et je dirais tellement légers en réalité, que la sortie serait normale".
Mécontent du rejet de précédentes demandes de libération sous caution, Carlos Ghosn avait décidé de changer mi-février son équipe de défense japonaise, au moment d'aborder la phase de préparation de son procès, qui n'interviendra pas avant plusieurs mois.
"Je suis impatient de pouvoir me défendre, avec vigueur, et ce choix représente pour moi la première étape d'un processus visant non seulement à rétablir mon innocence, mais aussi à faire la lumière sur les circonstances qui ont conduit à mon injuste détention", avait alors dit Carlos Ghosn.
"Complot"
Celui qui était vénéré au Japon pour avoir sauvé Nissan avait été arrêté le 19 novembre à Tokyo et placé dans le centre de détention de Kosuge, dans le nord de la capitale, prison qu'il devrait quitter dans la journée.
Carlos Ghosn a été inculpé pour minoration d'une partie de ses revenus pour un montant de 9,23 milliards de yens (74 millions d'euros) de 2010 à 2018, dans les rapports de Nissan remis aux autorités boursières. Il a également été inculpé pour abus de confiance.
Il avait dénoncé fin janvier, lors d'un entretien accordé à l'AFP, sa détention prolongée, un traitement qui "ne serait normal", selon lui, "dans aucune autre démocratie".
Il estime avoir été victime d'un "complot" ourdi par Nissan pour faire échouer son projet de rapprochement avec Renault.
Nissan, à l'origine de l'enquête qui a conduit M. Ghosn en prison, a rapidement réagi.
"Nissan ne joue aucun rôle dans les décisions prises par les tribunaux ou les procureurs et n'est donc pas en position de commenter", avait dit mardi le groupe dans un message transmis aux médias.
"Les investigations menées en interne chez Nissan ont montré des conduites (de M. Ghosn) manifestement contraires à l'éthique (...) et d'autres faits continuent d'émerger", a ajouté le constructeur, au chevet duquel était arrivé M. Ghosn en 1999.
La libération de Carlos Ghosn "n'a pas de conséquences sur les affaires de Nissan", a assuré l'actuel directeur général du groupe, Hiroto Saikawa.
En théorie, Carlos Ghosn, qui est toujours en titre administrateur de l'entreprise, pourrait assister à un conseil d'administration, mais cette possibilité risque de lui être refusée par le groupe.
burx-kap/uh/roc
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