Une information judiciaire a été ouverte pour éclaircir les circonstances dans lesquelles les deux victimes - qui circulaient sans casque sur un scooter de grosse cylindrée, volé et dépourvu de plaques - ont trouvé la mort en percutant un autocar, tandis qu'un véhicule de la brigade anticriminalité les suivait.
Le parquet évoque pour l'heure "un accident", alors que l'idée d'une "bavure" prévaut dans le quartier Mistral où vivaient les deux jeunes. "Vous pouvez écrire que la police est responsable de leur mort", a lancé à un journaliste de l'AFP une proche des victimes, les yeux rougis, en sortant du palais de justice de Grenoble dimanche en début de soirée, où le procureur Éric Vaillant a reçu "les pères, les oncles, une sœur des deux jeunes" durant plus d'une heure.
Lors d'une conférence de presse, le magistrat a écarté, en l'état d'une enquête "qui ne fait que débuter", tout choc entre le véhicule de la police qui suivait les deux jeunes et le scooter. "J'ouvre une information pour recherche des causes du décès. Je ne vise aucune infraction commise par les uns ou les autres", a-t-il insisté.
Les premières investigations s'appuient notamment sur les images d'une caméra de vidéosurveillance, qui montre la scène "de façon assez vague", et le témoignage du chauffeur de l'autocar qui transportait une équipe de football de l'agglomération.
Le drame est survenu vers 22H30 autour d'un pont et d'une bretelle d'autoroute. Ayant aperçu le scooter dans son rétroviseur, suivi d'un véhicule de police, le conducteur du bus - dont les tests d'alcoolémie et aux stupéfiants se sont avérés négatifs - affirme avoir serré à droite pour les laisser passer. A ce moment-là, les deux jeunes tentaient, eux, de le doubler par la droite et ils se sont retrouvés coincés contre le parapet, selon le procureur.
"Il fallait qu'ils s'arrêtent"
Plus tôt dans la soirée, un scooter similaire avait été signalé pour des infractions routières, avant la course-poursuite fatale. Pour les enquêteurs, il s'agit du même scooter, "mais le lien n'est pas encore totalement avéré".
Pour autant, l'intervention des policiers était "totalement justifiée", d'après le parquet: ils n'auraient pas suivi les deux jeunes "s'ils n'avaient pas mis les autres usagers de la route en danger, en brûlant des feux rouges, en roulant sur le trottoir, en roulant à vive allure".
Dans la nuit, le drame a déclenché de violents incidents dans le quartier Mistral où une caserne de CRS a été prise pour cible. Des policiers et gendarmes, arrivés en renfort, ont répliqué à des jets de cocktails Molotov par des tirs de grenades lacrymogènes et de balles de défense. Des voitures et des poubelles ont été incendiées, ainsi que le hall d'une école d'infirmières, un local associatif et du mobilier urbain. Aucune interpellation n'a eu lieu.
En dépit de l'appel au calme du maire écologiste de la ville Éric Piolle, de nouveaux incidents - incendies de véhicules et dégradation de mobilier urbain - étaient en cours dimanche depuis 20H00 dans le quartier, ont indiqué les pompiers.
"Des jeunes du quartier ont vu ce qui s'est passé et ont le sentiment d'une bavure policière, c'est de là que vient toute cette tension", estime Hassen Bouzeghoub, directeur du centre socio-culturel du quartier. Selon lui, le plus jeune des décédés était scolarisé au lycée, l'autre travaillait dans un commerce avec son père.
Ils étaient connus des services de police pour des faits de petite délinquance.
Un habitant du quartier aurait filmé une partie de la poursuite et un jeune de 16 ans aurait été éborgné par un tir de LBD, informations que n'a pas confirmées le parquet.
Le quartier avait déjà connu une flambée de violences il y a une semaine après l'arrestation d'un homme détenteur de cannabis par une brigade spécialisée. Des renforts de police y ont été maintenus dimanche soir.
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