Le président américain Donald Trump et le dirigeant nord-coréen Kim Jong Un avaient fait tous deux un long trajet pour leur second tête-à-tête consacré à l'épineux dossier de la dénucléarisation de la Corée du Nord mais la rencontre a tourné court, les deux camps se séparant sans la déclaration conjointe initialement prévue.
Chacun a cherché à imputer à l'autre la responsabilité de cette impasse.
Donald Trump a affirmé que Pyongyang avait exigé la levée de toutes les sanctions qui lui sont imposées du fait de ses programmes nucléaire et balistique interdits.
Le Nord a dit qu'il n'avait demandé qu'une levée "partielle" de ces restrictions. Et, fait rarissime, le ministre nord-coréen des Affaires étrangères Ri Yong Ho a convoqué une poignée de journalistes pour livrer sa version.
En échange d'un allègement des mesures qui l'étranglent, a dit le chef de la diplomatie nord-coréenne, Pyongyang propose de "démanteler complètement toutes ses infrastructures de production nucléaire" dans son complexe de Yongbyon. Il n'y aura pas de meilleure offre, a-t-il prévenu.
De son côté, la Chine -- alliée de Pyongyang -- a appelé vendredi à discuter à l'ONU de la levée partielle des sanctions économiques frappant la Corée du Nord.
Le désaccord n'a pas empêché l'agence officielle nord-coréenne KCNA de souligner que Donald Trump et Kim Jong Un avaient eu des "échanges très constructifs et francs".
De retour à Washington, le président américain a martelé vendredi que ses relations avec le leader nord-coréen restaient "très bonnes".
"Nous avons eu de véritables négociations sur le fond avec Kim Jong Un: nous savons ce qu'ils veulent et ils savent ce que nous devons avoir", a-t-il souligné dans un tweet.
Les relations entre les deux pays ennemis pendant la guerre de Corée (1950-53), un conflit qui se poursuit en théorie faute de traité de paix, sont "caractérisées par la défiance et l'antagonisme" depuis des décennies, a dit l'agence. Inévitablement, il y aura "des difficultés et des épreuves" pour établir des relations nouvelles.
"Un vrai leader"
Le sommet de Hanoï fut une "réussite", affirme cependant KCNA, ajoutant que l'homme fort de Pongyang a proposé à Donald Trump une nouvelle rencontre.
Le président américain a également espéré revoir rapidement le dirigeant nord-coréen, sans autre précision.
Il "faut parfois quitter" les négociations, a lancé Donald Trump, expliquant qu'il pouvait obtenir mieux. "Je préfère le faire bien que le faire rapidement".
Le sommet de Hanoï a déçu toutes les attentes après le premier rendez-vous de Singapour en juin. Les deux dirigeants passés en quelques mois des insultes personnelles aux éloges de la part de Donald Trump n'avaient alors signé qu'une vague déclaration sur la "dénucléarisation de la péninsule coréenne".
D'après de hauts responsables américains, les Nord-Coréens avaient exigé dans les jours précédant Hanoï la levée de facto de toutes les sanctions économiques imposées par le Conseil de sécurité de l'ONU depuis mars 2016.
Avant cette date, les résolutions concernaient essentiellement l'interdiction des transferts de technologie. Les sanctions les plus récentes portent en revanche sur des secteurs économiques beaucoup plus rentables, dont les exportations nord-coréennes de charbon et de minerai de fer, les produits de la mer et le textile.
"C'était en fait toutes les sanctions sauf les armements", a dit un haut responsable du département d'Etat américain. "Cela revient à plusieurs milliards de dollars".
Manque de préparation
En échange, a-t-il dit, ils proposaient uniquement de fermer une "partie du complexe" de Yongbyon, un site gigantesque qui comprend de multiples infrastructures.
Le Nord disposerait en outre d'autres centres de production d'uranium enrichi.
Le dialogue se poursuit néanmoins.
"Les Etats-Unis ont hâte de revenir à la table pour poursuivre cette conversation qui conduira au bout du compte à la paix et à la stabilité", a déclaré le secrétaire d'Etat Mike Pompeo, en visite à Manille.
Le président sud-coréen Moon Jae-in, cheville ouvrière du rapprochement entre Washington et Pyongyang, a également voulu voir le bon côté des choses. La réunion a permis des "progrès significatifs", Donald Trump et Kim Jong Un renforçant leur "confiance" et "compréhension mutuelle".
Certains analystes abondent dans ce sens: "Je ne pense pas que (l'échec) soit un désastre, cela ne met pas un terme au processus de dialogue", a déclaré Chris Green, de l'International Crisis Group. M. Trump ne pouvait risquer "un mauvais accord" et "cette position dure va lui bénéficier".
Mais d'autres dénoncent un manque de préparation en amont. Le blocage démontre l'importance "des discussions de travail", a relevé Kathleen Stephens, ancienne ambassadrice des Etats-Unis en Corée du Sud.
Si le président américain a quitté le Vietnam tout de suite après le sommet, Kim Jong Un y a entamé une visite officielle, jusqu'à samedi, la première depuis celle de son grand-père Kim Il Sung en 1964.
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