LE CONTEXTE
Les Israéliens sont appelés à élire leurs députés le 9 avril. Les élections auraient dû avoir lieu en novembre à la fin prévue de la mandature. C'est M. Netanyahu qui a fait en sorte que le calendrier soit avancé. Il aurait voulu parer l'effet de l'annonce attendue de la part du procureur général quant à son inculpation, ou non, dans les affaires de corruption présumée le concernant.
LE COUP DE TONNERRE
Le procureur général Avichaï Mandelblit a annoncé jeudi son intention d'inculper M. Netanyahu pour corruption, fraude et abus de confiance dans trois affaires. En cause: des échanges de bons procédés entre gouvernants et hommes d'affaires, des cadeaux acceptés de la part de richissimes personnalités et une tentative de collusion avec la presse.
Le procureur général offre au Premier ministre de s'expliquer devant lui avant de décider définitivement de l'envoyer devant le juge. L'inculpation et le procès sont le scénario le plus communément anticipé. Mais ce n'est pas automatique.
M. Netanyahu, chef du parti de droite Likoud, nie tout en bloc, dénonce un complot de la part de ses adversaires et assure que "ce château de cartes s'écroulera totalement après les élections".
LE CALENDRIER
Une rencontre entre le procureur général, M. Netanyahu et ses avocats n'est pas attendue avant le 9 avril et les législatives. Une éventuelle inculpation devrait prendre des mois, sans parler de la première audience d'un procès.
Compte tenu de la procédure, "il faut compter peut-être un an avant que l'inculpation se produise effectivement, puis plusieurs années de procès et d'appels", dit Gayil Talshir, professeure de sciences politiques.
M. Netanyahu mise précisément sur le temps, dit-elle. Pari risqué si la pression va grandissant et que les prétendants à sa succession sortent de leur silence. "Le jour où cela se produira, ce sera la fin de l'ère Netanyahu”, selon Mme Talshir.
LE CADRE LEGAL
M. Netanyahu, s'il était reconduit à son poste après les élections, puis inculpé, serait le premier chef de gouvernement à connaître pareille avanie dans l'histoire d'Israël. L'absence de précédent rend difficilement prévisible le lendemain des élections, mais aussi les élections elles-mêmes, déjà indécises.
Rien, légalement, ne forcerait M. Netanyahu à démissionner s'il était reconduit et inculpé, jusqu'à épuisement de tous les recours. M. Netanyahu a assuré qu'il comptait gouverner "pendant encore de nombreuses années".
La pression politique est une autre affaire. Le public risque de remettre en question la légitimité d'un Premier ministre inculpé, jugent les experts du think-tank Institut d'Israël pour la démocratie. "Cette question sera très probablement tranchée par la Cour suprême", disent-ils, anticipant des actions engagées contre M. Netanyahu devant cette cour.
L'IMPACT SUR LES ELECTIONS
Les prochains sondages seront minutieusement épluchés. Les enquêtes d'opinion donnent depuis peu la liste centriste de Benny Gantz en tête devant le Likoud de M. Netanyahu. Mais ce dernier semble mieux placé pour former une coalition gouvernementale, avec les partis de droite, que son challenger.
L'annonce du procureur général peut-elle changer la donne ? "C'est l'inconnue", dit Ilan Greilsammer, professeur de sciences politiques. Chacun scrutera les signes d'une migration des électeurs du Likoud. "Les électeurs de base du Likoud lui sont fidèles et ceux qui votent Netanyahu par loyauté ne se laisseront pas influencer par des allégations auxquelles ils ne croient pas".
Au contraire, envisage-t-il, elles pourraient mobiliser en faveur du Likoud, ce qui paradoxalement desservirait M. Netanyahu en affaiblissant les autres partis du bloc de droite.
Gayil Talshir prédit un scrutin serré entre Likoud et liste centriste, auquel cas "tous les partis de droite resteront avec Netanyahu". La plupart d'entre eux ont dit jeudi maintenir leur soutien à M. Netanyahu.
Ilan Greilsammer juge pour l'instant "peu réaliste" une coalition entre le Likoud et la liste centriste "tant que Netanyahu reste à la tête du Likoud".
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