Selon la commission, dont le mandat était limité aux événements de 2018, ces manifestations étaient essentiellement de "nature civile" et il existe des "motifs raisonnables de croire que des tireurs d'élite israéliens ont tiré sur des journalistes, du personnel de santé, des enfants et des personnes handicapées, en sachant qu'ils étaient clairement reconnaissables comme tels".
D'après les enquêteurs, mandatés par le Conseil des droits de l'Homme de l'ONU mais qui n'ont pas reçu le feu vert d'Israël pour aller sur le terrain, "plus de 6.000 manifestants non armés ont été touchés par des tireurs d'élite militaires" lors des manifestations l'an dernier.
Le Premier ministre Benjamin Netanyahu a rejeté le rapport sur Twitter: "Le Conseil établit de nouveaux records d'hypocrisie et d'attitude mensongère, motivé par sa haine obsessive d'Israël".
Israël a aussi invoqué son droit à se défendre contre les agissements du mouvement islamiste palestinien Hamas, qui gouverne sans partage la bande de Gaza, tandis que ce dernier a réclamé que la communauté internationale fasse "rendre des comptes" à Israël pour "crimes de guerre".
A Genève, le président de la commission de l'ONU, Santiago Canton, a expliqué que le droit international relatif aux droits de l'Homme était applicable à ces manifestations car l'enquête avait montré qu'"une majorité écrasante des manifestants n'étaient pas armés, même s'ils n'étaient pas tout le temps pacifiques".
"Les soldats israéliens ont commis des violations du droit international humanitaire et des droits humains. Certaines de ces violations peuvent constituer des crimes de guerre ou des crimes contre l'humanité et doivent immédiatement faire l'objet d'une enquête par Israël", a-t-il affirmé, assurant que seul un tribunal pourra déterminer s'il y a bien eu de tels crimes.
La commission recommande par ailleurs aux autorités de la bande de Gaza de cesser d'utiliser des "cerfs-volants et des ballons dotés de dispositif incendiaire", l'envoi de ces engins vers Israël constituant un des aspects de la vaste mobilisation palestinienne.
La bande de Gaza, coincée entre Israël, l'Egypte et la Méditerranée, est le théâtre depuis mars 2018 de protestations hebdomadaires, généralement accompagnées de violences, le long de la barrière.
Au moins 251 Palestiniens ont été tués par des tirs israéliens depuis cette date, la grande majorité le long de la frontière, et les autres dans des frappes israéliennes en représailles à des actes hostiles en provenance de l'enclave.
Deux soldats israéliens ont été tués sur la même période.
La commission a procédé à 325 entretiens avec des victimes, des témoins et des sources et recueilli plus de 8.000 documents. Elle a aussi eu accès à du matériel audiovisuel, dont des enregistrements réalisés par des drones.
Liste confidentielle de suspects
Outre la fin du blocus israélien imposé à l'enclave depuis plus de 10 ans, la "Marche du retour" réclame le retour des réfugiés palestiniens sur les terres qu'ils ont fuies ou dont ils ont été chassés à la création de l'Etat d'Israël en 1948. Israël n'a cessé de proclamer que cette protestation massive était orchestrée par le Hamas, auquel il a livré trois guerres depuis 2008.
Mais pour les enquêteurs de l'ONU, "les manifestations étaient de nature civile, avec des objectifs politiques clairement énoncés" et "malgré certains actes de violence importante, la commission a estimé que les manifestations ne constituaient pas des combats ou des campagnes militaires".
"Il n'y a aucune raison de tuer ou de blesser des journalistes, des médecins et des personnes qui ne représentent pas une menace imminente de mort (...) pour les personnes qui les entourent. Cibler des enfants et des personnes handicapées est particulièrement alarmant", a relevé une autre enquêtrice de l'ONU, Sara Hossain.
La commission présentera un rapport plus détaillé le 18 mars devant le Conseil des droits de l'Homme. Elle a par ailleurs créé un "fichier confidentiel" des responsables présumés des violations et invite la Haut-Commissaire de l'ONU aux droits de l'Homme, à qui cette liste va être transmise, de la partager avec la Cour pénale internationale.
Les enquêteurs recommandent aussi la mise sur pied de sanctions internationales contre ces individus.
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