Mercredi soir, le gouvernement néerlandais a annoncé avoir achevé son opération de rachat de parts d'Air-France KLM et en détenir 14%, soit presque autant que la France, dans le but de contrer l'influence de Paris dans le groupe de transport aérien.
"Trouvons ensemble une porte de sortie qui permette de renforcer" la compagnie aérienne, a affirmé sur Public Sénat le ministre de l'Economie français Bruno Le Maire, qui attend des "éclaircissements" de la part de son homologue néerlandais Wopke Hoekstra, qu'il recevra vendredi matin à Bercy.
L'acquisition de ces actions, réalisée sans que la France ne soit prévenue, devrait donner accès à l'Etat néerlandais au conseil d'administration du groupe, composé de 16 membres, dont deux proposés par l'État français et un représentant de l'Etat nommé par arrêté ministériel.
La question du nombre de sièges dont il disposera relève "d'une décision du conseil d'administration d'Air France-KLM", selon un porte-parole du groupe.
M. Le Maire a qualifié l'opération "d'inamicale" et "d'incompréhensible", réitérant ses reproches à La Haye pour ne pas avoir prévenu Paris sur ses intentions estimant que cette opération "détruit de la valeur". Mercredi, le titre Air France-KLM a plongé de 11,74% à 11,24 euros.
Le président Emmanuel Macron lui même est entré dans le débat et a appelé les Pays-Bas à "clarifier" leurs intentions.
Selon des analystes hollandais, l'Etat néerlandais a eu peur que KLM ne se fasse engloutir par Air France, et cherche à protéger les sociétés nationales à l'heure où le protectionnisme gagne du terrain en Europe et dans le reste du monde.
Réunions secrètes
"Ce qui est frappant, choquant, violent c'est la méthode" des Pays-Bas, a estimé Michel Sapin, l'ancien ministre de l'Economie de François Hollande, ajoutant que cette "méthode hostile" de l'Etat néerlandais donnait une "très mauvaise image" de l'Europe.
Selon le journal hollandais AD, cette acquisition était planifiée depuis 2017.
Le projet a été discuté au cours de réunions avec seulement quatre ministres: le premier ministre Mark Rutte, le ministre des Finances Wopke Hoekstra, celui des Infrastructures Cora van Nieuwenhuizen et celui des affaires économiques Eric Wiebes, a raconté le journal.
Elles étaient si secrètes que même les ministres devaient laisser leurs téléphones à l'entrée, poursuit-il.
La décision finale a été prise le 15 février, le jour même où M. Hoekstra et Mme van Nieuwenhuizen rencontraient le patron d'Air France-KLM Benjamin Smith à La Haye.
Le patron de KLM Pieter Elbers --qui a été au centre de tensions récentes sur la reconduction de son mandat-- n'a pas été informé avant de recevoir un message de M. Hoekstra, selon la même source.
Le journal indique que les premiers signaux d'alerte se sont déclenchés, côté hollandais, quand les compagnies Delta et China Eastern Airlines, sont entrées au capital du groupe à hauteur de 8,8% chacune, avec des inquiétudes sur le rôle de l'aéroport d'Amsterdam-Schiphol en tant que hub européen majeur.
Ces liens capitalistiques avec ces compagnies américaine et chinoise ont été noués sous l'ère de l'ancien PDG Jean-Marc Janaillac, dans le but d'augmenter la force de frappe du groupe sur les marchés concurrentiels d'Amérique du nord et d'Asie alors qu'Air France-KLM perd du terrain face à ses principaux concurrent européens Lufthansa et IAG et subit les tarifs très agressifs des compagnies du Golfe et des low-cost.
Il y a un peu plus d'une semaine, M. Smith, fort du succès de la signature d'accords salariaux après un début d'année 2018 marqué par des grèves chez Air France, avait réaffirmé son intention de faire du géant franco-néerlandais un "groupe (aérien) leader en Europe".
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