La cheffe du gouvernement réalise là une concession majeure: elle avait toujours écarté jusqu'ici l'idée de retarder la sortie du Royaume-Uni de l'UE, prévue le 29 mars.
Sa volte-face lui permet de désamorcer les menaces de démission de certains Conservateurs, qui craignaient, à 30 jours de l'échéance, de voir se concrétiser le scénario d'un "no deal". Elle obtient aussi un délai supplémentaire pour conclure avec les dirigeants européens une version remaniée de l'accord de retrait, le texte initial ayant été rejeté par le parlement britannique en janvier.
"Je sais ce dont cette assemblée a besoin pour soutenir un accord de retrait", a affirmé mardi Theresa May à la Chambre des communes. "Et je travaille dur pour l'obtenir".
Pour la suite, elle propose un mécanisme qui se décompose en trois étapes. Elle prévoit d'abord de soumettre au vote du parlement, le 12 mars au plus tard, la version modifiée de l'accord de divorce qu'elle aura pu obtenir de Bruxelles.
Si cette nouvelle version est rejetée par les députés, elle leur demandera le 13 mars s'ils veulent sortir de l'UE sans accord. S'il refusent, elle leur soumettra le 14 mars une proposition de report du Brexit.
"Plus de temps"
Ce mécanisme a été accueilli avec soulagement par les membres du Parti conservateur effrayés par l'hypothèse d'une sortie sans accord.
"Satisfait que la Première ministre ait effectivement exclu un Brexit sans accord, donnant ainsi aux députés la possibilité de disposer de plus de temps pour trouver un compromis, si son accord ne passe pas", a ainsi tweeté Richard Harrington, le secrétaire d'Etat chargé de l'Industrie. Il avait menacé mardi de démissionner, comme deux autres membres du gouvernement, pour forcer l'exécutif à écarter le scénario d'un "no deal".
Le député conservateur Oliver Letwin et la travailliste Yvette Cooper, eux, ont retiré l'amendement qu'ils voulaient soumettre au vote mercredi, qui prévoyait d'imposer au gouvernement de retarder le Brexit en cas d'absence d'accord au 13 mars. Ils l'ont remplacé par un autre amendement qui reprend les termes de la proposition gouvernementale.
Dans un avis publié mardi, le gouvernement avait rappelé que sans accord, la croissance de l'économie britannique serait de 6,3 à 9% inférieure à son niveau de développement sur quinze ans en cas de maintien dans l'UE. Il a également mis en garde sur les conséquences d'éventuelles perturbations du trafic trans-Manche, notamment le risque de "pénuries" de certains produits alimentaires, en particulier les fruits et légumes frais.
"Complot" contre le Brexit
Mais sur un sujet aussi clivant que le Brexit, les concessions de Theresa May n'offrent pas au gouvernement un soutien unanime des parlementaires.
Les plus fervents Brexiters ont exprimés leurs inquiétudes sur ce compromis qui menace selon eux la concrétisation du Brexit. "Pour moi, tout retard du Brexit est un complot visant à l'arrêter", a tweeté le député conservateur Jacob Rees-Mogg.
Le chef du Labour, Jeremy Corbyn, a lui annoncé le dépôt d'un amendement demandant le maintien du pays dans une union douanière avec l'UE après le Brexit. Il a prévenu que si cet amendement n'était pas adopté, il prévoyait de déposer, à une date ultérieure non précisée, un autre amendement réclamant un second référendum.
Cette prise de position, qui constitue un revirement inattendu de la part du leader travailliste, a été interprétée comme une tentative d'endiguer les défections au sein du parti, dont les membres les plus europhiles lui reprochaient son attitude ambiguë sur le Brexit.
Enfin, le tout nouveau "Groupe indépendant", qui réunit justement onze anciens députés travaillistes et conservateurs déçus par la position de leurs partis respectifs sur le Brexit, a déposé un amendement réclamant l'organisation d'un second référendum. Cet amendement a reçu le soutien du parti indépendantiste écossais SNP et du Parti libéral-démocrate.
La motion du gouvernement, ainsi que les amendements qui auront été sélectionnés par le président de la Chambre des communes John Bercow, seront soumis au vote à partir de 19h00 GMT.
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