"Si attaquer un musée à l'arme de guerre n'est pas violent et bestial, alors rien ne sera jamais violent et bestial. On est parmi les infractions les plus graves", lance le procureur Bernard Michel, au moment d'achever son réquisitoire contre le jihadiste français, accusé de quatre "assassinats terroristes" commis le 24 mai 2014.
"On vous demande un verdict de culpabilité", poursuit-il, face au jury populaire chargé de le juger. Verdict prévu le 7 mars. Ce n'est qu'ensuite que sera déterminée la peine éventuelle.
Un "verdict de culpabilité", mais pour "complicité", est également réclamé contre son co-accusé, Nacer Bendrer, 30 ans, un délinquant marseillais accusé de lui avoir fourni les armes.
"Au final, en ce qui concerne ces assassinats à caractère terroriste, on a bien un auteur principal, Mehdi Nemmouche, et un complice, Nacer Bendrer", résume Bernard Michel, qui représente le parquet depuis plus de six semaines de procès, en compagnie d'Yves Moreau.
"Nous sommes tous les deux convaincus au plus profond de nous-mêmes que les deux accusés ont bien commis ces actes", insiste-t-il.
Dès lundi, les deux hommes avaient égrené "23 éléments à charge" contre Nemmouche: empreintes ou ADN sur les armes, vidéos de revendications où l'on reconnaît sa voix, témoins oculaires, téléphonie, déclarations "auto-incriminantes", morphologie similaire à celle du tireur sur la vidéosurveillance, attitude calme et parfois "caustique" depuis son arrestation...
"Pour le tueur, pour Mehdi Nemmouche, l'identité des victimes importait peu. Le but en revanche, c'est qu'il y ait des victimes. Tout cela a bien été prémédité", a poursuivi Bernard Michel mardi.
"Indécent et abject"
Il remarque que les quatre victimes ont toutes été exécutées d'une balle dans la tête, soit au revolver, soit à la Kalachnikov: "L'auteur n'était pas là pour discuter, il était là pour abattre".
Pour lui, Mehdi Nemmouche, délinquant multirécidiviste de 33 ans passé par la prison et la Syrie, "n'est pas simplement radicalisé, mais archiradicalisé", ce qui "l'a incité à refaire le parcours de (Mohamed) Merah", auteur de sept assassinats en 2012 dans le sud-ouest de la France.
Un homme qu'il considère comme "le plus grand mec que la France ait jamais connu", poursuit le magistrat en robe rouge, petites lunettes concentrées sur les pages de son réquisitoire.
Au fil d'un discours méthodique, il rejette avec fermeté la thèse de la défense, selon laquelle la tuerie n'est pas une attaque du groupe Etat islamique (EI), mais "une exécution ciblée d'agents du Mossad", (les services secrets israéliens) visant un couple d'Israéliens, les époux Riva, les deux premières des quatre victimes abattues ce jour-là.
Les autorités israéliennes qualifient cette thèse d'"absurde et insultante", souligne le procureur. Avant d'ironiser: "Si Israël avait estimé qu'il s'agissait bien d'un attentat ciblé, le Mossad serait venu lui-même mener l'enquête à notre place. On les aurait vus débarquer en hélicoptère."
Il avait déjà qualifié lundi l'argument de "déplacé, indécent et abject à l'égard des victimes", sur lesquelles il fait peser "le poids de leur propre mort".
Dans le box, Mehdi Nemmouche reste comme souvent impassible. Ses avocats, eux, brillent par leur absence.
Ils ont promis de revenir sur cette thèse, pour l'instant très peu étayée, durant leur plaidoirie prévue jeudi.
Mais ils auront fort à faire pour convaincre le jury de l'innocence de leur client, les principaux arguments qu'ils ont soulevés ayant été battus en brèche par les enquêteurs et les experts venus témoigner.
"De leur côté, je n'attends rien", tranche Me Adrien Masset, l'avocat du musée juif.
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