Après l'échec des négociations entre partenaires sociaux la semaine dernière, l'État, pour la première fois depuis 1982, reprend la main et va édicter seul les règles d'assurance chômage.
Un décret sera publié "pendant l'été", après des décisions "au printemps", a annoncé mardi le Premier ministre, sans préciser si l'annonce de ces mesures interviendrait avant ou - c'est plus probable - après les élections européennes du 26 mai.
"Le principe d'une indemnisation du chômage est un des fondamentaux de notre modèle social", a souligné Édouard Philippe, qui s'exprimait lors d'une conférence de presse à Matignon, aux côtés de la ministre du Travail Muriel Pénicaud.
En septembre, c'est lui qui avait signé une lettre de cadrage, feuille de route de la négociation. Ce document a été dénoncé comme trop contraignant par les partenaires sociaux, qui y ont vu l'obligation de réussir une "mission impossible". "Nous avons laissé toutes les chances à la négociation", a rétorqué Édouard Philippe mardi.
Les économies à hauteur de 3,9 milliards d'euros sur trois ans, qui hérissaient les syndicats, sont toujours au menu.
S'agissant des contrats courts, qui explosent en France y compris pour des CDD ne durant qu'une journée, le Premier ministre a expliqué que "les entreprises doivent être beaucoup plus responsabilisées". Questionné sur le bonus-malus, promesse de campagne d'Emmanuel Macron rappelée lors du grand débat, il a parlé d'une "solution qui est "sur la table".
"Personne ne nous a proposé à ce stade une meilleure solution que celle du bonus-malus", a-t-il déclaré en évoquant cette mesure de modulation des cotisations chômage des entreprises en fonction de leur recours aux CDD.
Demandée par les syndicats, au premier rang desquels Force ouvrière, elle est vivement contestée par le patronat depuis des années.
FO a d'ailleurs immédiatement réagi, en jugeant le gouvernement plutôt "allant" sur la révision à la baisse des règles d'indemnisation", mais "moins assuré quant à la mise en œuvre d'un bonus-malus".
Parmi les pistes concernant l'indemnisation, le Premier ministre a évoqué une possible révision des règles sur les salaires élevés, c'est-à-dire les cadres.
Il a critiqué un système français qui permet d'avoir des niveaux d'indemnisation "trois fois supérieurs à ce qui se passe chez nos voisins", "alors même que le marché du travail des cadres est au plein emploi".
Il peut s'agir de la dégressivité des allocations chômage, à laquelle sont opposés tous les syndicats, ou d'une retouche du plafond d'indemnisation.
Concertation "intense"
Le Premier ministre a aussi évoqué "les cas où le montant de l'allocation chômage mensuelle est plus élevé que le salaire mensuel moyen perçu antérieurement", déjà mentionnés dans la lettre de cadrage.
Avant les arbitrages, la concertation sera "intense" et "approfondie", a assuré Muriel Pénicaud, qui rencontrera les leaders des organisations syndicales et patronales "dans les jours qui viennent".
Elle commencera par un "diagnostic" puis le partage de "solutions", anticipant "une cinquantaine de réunions" au total.
Interrogé sur la gestion du régime d'assurance chômage alors que certains estiment que l'échec de la négociation signe la fin du paritarisme, Édouard Philippe a affirmé: "Nous ne nous posons pas la question de la gouvernance de l'Unédic".
Par ailleurs, alors qu'une négociation tripartite est en cours entre l'État, l'Unédic et les partenaires sociaux sur Pôle emploi, Muriel Pénicaud a indiqué qu'ils allaient "revoir en profondeur l'offre de services" de cet opérateur public, pour "la rendre plus réactive, plus intense, plus adaptée à la situation particulière des personnes d'un côté et des entreprises de l'autre".
"Un gros travail a déjà été engagé, il y a beaucoup d'innovations intéressantes qui ont été lancées par Pôle emploi, mais nous voulons aller plus loin", a déclaré la ministre, sans entrer dans le détail.
Au quatrième trimestre 2018, environ 5,6 millions de personnes étaient inscrites à Pôle emploi et tenues de rechercher un travail, selon l'opérateur public.
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