Ces derniers jours, des hommes, femmes et enfants, dont de nombreux étrangers, sont sortis par milliers de la petite poche tenue par l'EI dans le village de Baghouz, aux confins orientaux de la Syrie.
Mais selon l'alliance arabo-kurde des Forces démocratiques syriennes (FDS), quelques milliers de civils, principalement des proches de jihadistes, se trouvent encore dans ce réduit d'un demi-kilomètre carré, composé de quelques pâtés de maisons accolés à un campement informel.
Soutenus par la coalition internationale emmenée par Washington, les FDS attendent le départ des derniers civils pour relancer l'offensive contre les jihadistes réfractaires, retranchés dans des tunnels au milieu d'un océan de mines.
Mardi matin, des hommes, femmes et enfants, sortis la veille de Baghouz à bord d'une quarantaine de camions, étaient soumis à des fouilles et des interrogatoires poussés des FDS, qui espèrent ainsi identifier des jihadistes, a constaté une journaliste de l'AFP.
Environ 300 personnes blessées, principalement des femmes, ont été recensées parmi ces nouveaux arrivants, notamment touchés par des mines qui ont explosé ou des bombardements. Parmi elles, une fillette de 11 ans qui a perdu sa jambe et un enfant de trois ans au poignet cassé accompagnant sa mère enceinte, elle aussi blessée.
Parmi les femmes, plusieurs ont expliqué ne pas avoir pu quitter Baghouz plus tôt parce qu'elles n'avaient pas suffisamment d'argent pour payer les passeurs leur permettant de fuir les jihadistes.
"A l'intérieur (de Baghouz), il n'y a que la faim", confie l'une d'entre elles. A côté, deux enfants dévorent de la confiture, à même le pot.
Non loin, une femme originaire du Kazakhstan demande à la ronde quand sera distribué un éventuel repas. Une Russe est également présente parmi les déplacés, selon la journaliste de l'AFP.
Quid des étrangers?
Depuis décembre, près de 50.000 personnes, principalement des familles de jihadistes, ont quitté la poche de l'EI, selon l'Observatoire syrien des droits de l'Homme (OSDH). Parmi eux, se trouvent plus de 5.000 jihadistes, selon l'OSDH.
Après une montée en puissance fulgurante en 2014, et la proclamation d'un "califat" sur les régions et les grandes villes conquises en Syrie et en Irak, l'EI a vu son territoire se réduire comme peau de chagrin.
A son apogée, l'organisation avait attiré des milliers d'étrangers. Des Français, des Britanniques, ou encore des Russes d'origine tchétchène.
Les femmes et les enfants sont aujourd'hui installées dans des enclaves qui leur sont réservées au sein de camps de déplacés du nord-est syrien, tandis que les hommes sont maintenus en détention.
Ce dossier est un véritable casse-tête pour les autorités semi-autonomes kurdes, qui réclament le rapatriement des étrangers, mais aussi pour les Occidentaux, qui rechignent globalement à les reprendre.
L'Irak voisin a annoncé lundi avoir accueilli 13 jihadistes français transférés depuis la Syrie. Ils seront jugés par la justice irakienne, qui a déjà condamné à mort ou à la prison à vie des centaines d'étrangers.
"Pour les Français majeurs" transférés en Irak, "ils relèvent d'abord des autorités de ce pays, à qui il revient de décider souverainement s'ils doivent faire l'objet de procédures judiciaires sur place", a souligné de son côté le président français Emmanuel Macron.
Ces 13 Français ont été transférés en Irak en même temps que 280 Irakiens également accusés d'être membres de l'EI.
"Ne pas crier victoire"
Le "califat" autoproclamé par l'EI couvrait autrefois un territoire vaste comme le Royaume-Uni. Les jihadistes y avaient établi leur propre administration, exécutant et torturant ceux qui ne respectaient pas leur loi, fomentant des attentats meurtriers y compris à l'étranger.
Aujourd'hui le groupe a commencé à muer en organisation clandestine, disséminant ses jihadistes dans le désert central de la Badiya en Syrie, développant des cellules dormantes dans les territoires perdus pour mener des attentats meurtriers, selon des experts.
En l'absence d'un engagement antiterroriste soutenu, il ne faudrait à l'EI qu'entre six à 12 mois pour entamer une "résurgence" et "reconquérir des territoires restreints", avait récemment averti l'armée américaine dans un rapport.
"Vous avez beaucoup de poches d'extrémistes en Syrie, faisant peser une puissante menace sur la Syrie, l'Irak, et l'Occident" a estimé lundi le président irakien Barham Saleh en visite à Paris.
"Ce n'est pas la fin de l'extrémisme et du terrorisme que nous avons connus", a-t-il déclaré. Il "ne faut pas crier victoire trop tôt".
La bataille contre l'EI représente aujourd'hui un des principaux fronts de la guerre en Syrie qui a fait plus de 360.000 morts et des millions de déplacés et réfugiés depuis 2011.
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