Le pape a voulu faire comprendre aux 190 participants de tous les continents leur "responsabilité" individuelle et collégiale face aux scandales, et prendre aussi par le bras des épiscopats d'Asie et d'Afrique affirmant se sentir peu concernés y compris cette semaine.
Le cardinal colombien Rubén Salazar Gómez a décroché la palme du discours le plus impitoyable, dénonçant une "mentalité cléricale" privilégiant "les bourreaux", "une déformation monstrueuse du ministère sacerdotal" et des prélats prêts à mentir "pour ne pas reconnaître l'horrible réalité".
La crédibilité de l'Eglise catholique a été sévèrement entachée en 2018 par de nouveaux scandales de grande ampleur, au Chili, aux Etats-Unis ou encore en Allemagne.
Aux présidents de 114 conférences épiscopales, chefs des Eglises catholiques orientales et supérieurs de congrégations religieuses, le pape a donc réclamé "du concret" dès le lancement des débats jeudi en distribuant une feuille de route en 21 points.
Les organisateurs n'ont cessé de répéter que des plans d'action, voire des changements législatifs, seront travaillés durant l'après-sommet, en se retroussant les manches dès lundi.
Un "vade-mecum" spécifiant les démarches à entreprendre si un cas d'agression sexuelle émerge est déjà en cours de rédaction à l'intention des pays peu dotés d'experts.
Secret pontifical
Trois membres de la Curie ont évoqué la possible levée du "secret pontifical" pour des cas avérés d'abus sexuels du clergé. Ils veulent de la transparence sur les procédures judiciaires de l'Eglise, qui entendent les victimes comme témoins puis ne les informent jamais de l'état d'avancement du dossier.
Le Saint-Siège pourrait aussi mettre fin à l'opacité sur les statistiques documentant le nombre d'abus sexuels, qui alimente "des théories du complot", a souligné le cardinal allemand Reinhard Marx.
Ce dernier a lâché une bombe samedi en admettant que des épiscopats ont pu détruire des dossiers sur des ecclésiastiques suspects.
Le cardinal américain Blase Cupich, autre allié du pape, a présenté vendredi "un cadre" déjà très détaillé "pour la construction de nouvelles structures juridiques de responsabilisation dans l'Eglise".
Certaines propositions s'inspirent de ce qui existe aux Etats-Unis, à l'instar d'une "ligne téléphonique dédiée" ou d'un "portail web" permettant aux victimes de signaler leur cas à une haute autorité indépendante.
Omniprésence des victimes
Les associations de victimes de pédophilie ont pour leur part ponctué la semaine d'actions, bien décidées à faire entendre leur voix. Mais elles seront forcément critiques sur l'absence d'un document final.
L'Americain Peter Isely, l'un des fondateurs de la nouvelle organisation internationale "End clergy abuse" (ECA), réclame ainsi une "tolérance zéro" absolue inscrite dans les lois de l'Eglise obligeant un prêtre reconnu coupable d'abus sexuels d'être évincé de la prêtrise partout dans le monde.
Les participants avaient été appelés par le pape à rencontrer personnellement des victimes dans leurs pays avant de venir à Rome. Des témoignages particulièrement poignants ont aussi résonné dans la salle de réunion.
L'assistance a entendu par exemple un Asiatique raconter avoir été agressé "plus d'une centaine de fois" et parler d'une "bombe à retardement" en Asie. Et une Africaine confier avoir avorté à trois reprises, sous la coupe financière d'un prêtre violent refusant de mettre des préservatifs.
Les prélats ont été gratifiés au final du discours très incisif d'une journaliste de télévision mexicaine, doyenne des voyages papaux, invitée pour leur parler de communication.
"Moins vous informerez les mass media, et donc les fidèles et l'opinion publique, plus le scandale sera grand", a prévenu Valentina Alazraki, suscitant les applaudissements de la salle de presse du Vatican. Elle s'est étonnée que les communiqués du Saint-Siège sur les renonciations subites d'évêques précisent rarement s'ils ont commis ou non des agressions sexuelles.
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