"Jusqu'à la garde", premier long métrage de Xavier Legrand et film marquant sur un sujet de société difficile, a reçu quatre prix (pour dix nominations), dont la récompense suprême, le César du meilleur film, et celle pour la meilleure actrice, Léa Drucker.
"Quand on a tourné le film en 2016, il y avait 123 femmes qui avaient été assassinées par leur conjoint et ex-conjoint. Aujourd'hui, depuis le 1er janvier 2019, 25 femmes ont été assassinées, ce qui veut dire qu'on est passé à une femme tous les deux jours, alors qu'en 2016 c'était une tous les trois jours", a déclaré Xavier Legrand.
"Il serait temps de penser à ces victimes à un autre jour que le 25 novembre", journée internationale de lutte contre les violences faites aux femmes, a-t-il ajouté.
"Je voudrais dédier cette récompense à toutes les Miriam, toutes ces femmes qui ne sont pas dans une fiction, qui sont dans cette tragique réalité", a souligné de son côté Léa Drucker, qui incarne dans le film une mère de famille qui tente de se reconstruire après une séparation avec un mari violent.
L'actrice, très émue de remporter son premier César, a salué "toutes les femmes, toutes les féministes, qui écrivent, agissent, prennent la parole et défendent au quotidien la cause des femmes, qui bravent parfois des tempêtes d'insultes et d'agressivité en tous genres".
L'habitué Audiard
Les César ont aussi récompensé à deux reprises le film "Les Chatouilles" d'Andréa Bescond et Eric Métayer sur la pédophilie, qui a reçu le prix de la meilleure adaptation et celui de la meilleure actrice dans un second rôle pour Karin Viard.
"Merci pour la visibilité de ce sujet parce que ça touche beaucoup d'enfants", a souligné Andréa Bescond, au sujet de ce film adapté d'une pièce récompensée aux Molières. "Peut-être qu'un jour on va être écouté, peut-être qu'un jour on va bousculer les tabous", a-t-elle dit la voix brisée.
Le César de la meilleure réalisation est revenu à Jacques Audiard, qui a déjà remporté deux fois ce même trophée (pour "De battre mon coeur s'est arrêté" et "Un prophète"). Son western franco-américain "Les Frères Sisters", son premier film entièrement en anglais, a également reçu plusieurs prix techniques, ceux des décors, du son et de la photo.
C'est le bluffant Alex Lutz qui a été sacré meilleur acteur pour son rôle dans "Guy" qu'il a également réalisé et où il s'est vieilli de 30 ans pour incarner, méconnaissable, une ancienne gloire de la chanson.
L'autre grand favori de la soirée avec "Jusqu'à la garde" avec dix nominations, "Le Grand bain", comédie sociale à succès de Gilles Lellouche sur des "quadras" et "quinquas" déprimés qui se lancent dans la natation synchronisée, est en revanche reparti quasi bredouille.
Seul le chanteur et acteur Philippe Katerine a été récompensé par le César du meilleur second rôle masculin pour son rôle d'employé de piscine municipale timide et enfantin qui se gave de sucreries.
Hommage à Redford
Au cours d'une soirée pauvre en coups d'éclat, si on excepte le seyant maillot de bain d'Elie Semoun en clin d'oeil à ce même film, le chanteur a déridé l'assemblée avec un discours plein d'humour, dédiant son César à son personnage, Thierry. "Je pense que tout le monde a quelque chose de Thierry", a-t-il dit, en se mettant à fredonner quelques paroles sur l'air de la chanson de Johnny Hallyday "Quelque chose de Tennessee".
Le début de la soirée a été marqué par la razzia de "Shéhérazade" de Jean-Bernard Marlin, histoire d'amour à Marseille entre un caïd et une jeune prostituée.
Il a reçu le César du meilleur premier film, tandis que ses deux interprètes principaux, Kenza Fortas et Dylan Robert, ont été récompensés par ceux des meilleurs espoirs féminin et masculin.
"Je dédie ce film à tous les gens qui galèrent", a lancé le réalisateur Jean-Bernard Marlin.
Les César ont salué la mémoire de plusieurs grands disparus (Aznavour, Legrand, Lagerfeld) mais aussi rendu hommage à une légende bien vivante, l'acteur américain Robert Redford, 82 ans, qui a reçu un César d'honneur. L'occasion pour lui d'égrener quelques souvenirs de ses premiers voyages en France. Un pays auquel l'actrice britannique Kristin Scott Thomas, présidente de la cérémonie, a clamé son attachement, en ces temps de Brexit.
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