Sur une position des Forces démocratiques syriennes (FDS), près de Baghouz, une équipe de l'AFP a vu passer le convoi escorté par l'alliance arabo-kurde à sa sortie de ce village où l'EI est retranché dans une petite poche d'un demi-kilomètre carré.
Après en avoir compté une trentaine, l'AFP a vu affluer environ dix camions de plus.
A bord de ces véhicules, se trouvent des femmes en niqab noir, certaines transportant un sac à dos, qui se retiennent aux parois du camion. Il y a aussi des enfants aux vêtements sales et couverts de poussière qui dévorent parfois un bout de pain, et des hommes au visage masqué. Pas un mot, pas un cri, pas une plainte n'émane de ces camions.
A Baghouz, les combattants de l'EI ne tiennent plus que quelques pâtés de maisons, où ils sont retranchés dans des tunnels, au milieu d'un océan de mines.
Mais il y a toujours dans le village des civils, principalement des femmes et des enfants de jihadistes, que les combattants kurdes et arabes des FDS, soutenus par la coalition internationale emmenée par Washington, cherchent à faire sortir.
"Nous attendons la fin des évacuations de civils pour donner l'assaut", a indiqué un porte-parole des FDS, Mustafa Bali, espérant que ces sorties se termineraient "aujourd'hui ou demain", alors que quelques "milliers" de personnes pourraient encore se trouver à Baghouz.
"Plusieurs Françaises"
Après une montée en puissance fulgurante en 2014, et la proclamation d'un "califat" sur les vastes régions et les grandes villes conquises en Syrie et en Irak, l'EI a vu son territoire se réduire comme peau de chagrin face à de multiples offensives.
Vendredi, l'équipe de l'AFP a pu entendre en début d'après-midi des tirs d'artillerie sporadiques, tandis que de la fumée noire s'élevait aux environs de Baghouz.
Pour Adnane Afrine, un autre porte-parole des FDS, les jihadistes et leurs proches récalcitrants qui refusent d'être évacués auront pour seul choix "la guerre ou la capitulation".
Mercredi déjà, près de 3.000 personnes étaient sorties de la poche de l'EI. Elles ont été transportées vers une zone où les FDS les soumettent à des fouilles et des interrogatoires poussés, afin d'identifier les jihadistes potentiels.
La "majorité" d'entre étaient des étrangers, a souligné M. Bali. "Principalement des Irakiens, des nationalités issues de l'ex-bloc soviétique, en plus d'Occidentaux", a-t-il précisé.
Depuis début décembre, près de 44.000 personnes, principalement des familles de jihadistes, ont fui le secteur, selon l'Observatoire syrien des droits de l'Homme (OSDH).
"Plusieurs Françaises", mais aussi des femmes venues d'Australie, d'Autriche, d'Allemagne et de Russie, se trouvent parmi ceux qui sortent, a confirmé à l'AFP David Eubank, le chef de l'ONG américaine Free Burma Rangers qui leur apporte premiers soins et nourriture.
De son côté, l'ONG Human Rights Watch (HRW) a appelé à protéger ces civils.
Citant des témoignages, HRW évoque des conditions de vie "terribles" ces derniers mois dans l'ultime réduit, "un manque de nourriture et d'aide obligeant (les habitants) à manger de l'herbe et des feuilles pour survivre".
Troupes américaines
La question des étrangers retenus en Syrie est un véritable casse-tête tant pour les autorités semi-autonomes kurdes, qui réclament leur rapatriement, que pour les Occidentaux, qui rechignent globalement à les reprendre.
Deux cas emblématiques viennent aujourd'hui illustrer la complexité du dossier: Hoda Muthana, dont la nationalité américaine est contestée par les Etats-Unis, et Shamima Begum, déchue de sa nationalité britannique par Londres.
Déclenchée en 2011, le conflit en Syrie s'est transformé en une guerre complexe qui a fait plus de 360.000 morts et des millions de déplacés et réfugiés.
Si l'EI est sur le point de perdre son ultime bastion en Syrie, ses jihadistes sont disséminés dans le désert central de la Badiya et revendiquent des attaques dans les régions des FDS.
Jeudi, le groupe a revendiqué un attentat à la voiture piégée mené à une dizaine de kilomètres seulement d'un champ pétrolier transformé en base militaire des FDS, qui a fait 20 morts, selon l'OSDH.
Avec la fin du "califat", se profile à l'horizon un désengagement des quelque 2.000 soldats américains déployés en Syrie pour épauler les FDS contre les jihadistes.
Ce retrait annoncé par M. Trump affaiblirait les forces kurdes, menacées par une offensive du voisin turc.
Mais Washington a annoncé jeudi le maintien "pour un certain temps" de 200 soldats, "un petit groupe de maintien de la paix", a expliqué la porte-parole de l'exécutif américain, Sarah Sanders.
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