Les ministres européens du Commerce se retrouvent vendredi à Bucarest pour une première discussion politique sur le sujet, avec l'objectif de parler d'une seule voix face à l'imprévisible Donald Trump, qui mène une politique protectionniste depuis son arrivée au pouvoir.
"Nous essayons de conclure un accord. Les Européens sont coriaces en négociation (...) Si nous ne trouvons pas un accord, nous imposerons des tarifs douaniers" sur les voitures, a encore menacé mercredi le président américain, qui a trois mois pour passer à l'acte.
L'Allemagne, qui veut à tout prix échapper à des taxes sur un secteur vital pour son économie, espère un signe fort des ministres."Voyons jusqu'où on peut aller", a affirmé son ministre de l'Economie, Peter Altmaier, à son arrivée. "Mon intention n'est pas de précipiter les choses, (mais) de parvenir à un large consensus", y compris "avec mon collègue français", a-t-il ajouté.
La France, elle, traine des pieds sur ce sujet sensible, en pleine crise des "gilets jaunes" et à trois mois des élections européennes.
La situation est d'autant plus complexe que les Européens, le président français Emmanuel Macron en tête, n'ont eu de cesse de répéter qu'ils refusaient de négocier "avec un pistolet sur la tempe".
"Ce n'est pas l'UE qui a remis 20 centimes dans le jukebox il y a quelques jours avec des déclarations", a relevé le secrétaire d'Etat Jean-Baptiste Lemoyne avant la réunion, en référence aux menaces de Donald Trump.
"Nous sommes attentifs au contexte, qui est très évolutif (...) L'UE ne négocie pas sous la menace", a-t-il rappelé.
Outre Paris, l'Espagne, dont les olives sont taxées par les Etats-Unis de manière selon elle injustifiée, ainsi que la Belgique, divisée par l'accord de l'UE avec le Canada, le CETA, semblent peu convaincues.
Malgré ces dissonances, la commissaire européenne au Commerce Cecilia Malmström, dont les services conduiront les négociations au nom des 28, espère obtenir un mandat de négociation dès le mois prochain.
Accord avant octobre
"Le Parlement européen (dont le rôle n'est que consultatif, ndlr) pourrait voter début mars" sur le sujet. "Les ministres devraient prendre une décision très rapidement après", a-t-elle estimé.
"Et si nous entamons des négociations maintenant, je pense que l'accord peut être conclu pendant le mandat" de la Commission, qui s'achève en octobre, a-t-elle ajouté.
Mais Jean-Baptiste Lemoyne a lui laissé entendre que la France était moins pressée: "Il faut attendre le Parlement européen, l'écouter. Les leaders se retrouveront un peu plus tard", lors d'un sommet européen les 21 et 22 mars.
"Aujourd'hui, c'est une première discussion politique. Il pourrait aussi y en avoir d'autres", a-t-il lancé.
L'idée d'un accord UE/Etats-Unis, qui porterait uniquement sur les biens industriels et pas l'agriculture, fait suite à une visite en juillet dernier du président de la Commission Jean-Claude Juncker à Washington, au moment où Donald Trump menaçait déjà de taxer les voitures européennes.
A la surprise générale, les deux dirigeants avaient conclu une trêve commerciale et s'étaient engagés à travailler sur le sujet.
Bruxelles fait valoir qu'un tel accord entraînerait d'ici 2033 un accroissement des échanges de 53 milliards d'euros - une goutte d'eau cependant dans le commerce UE/Etats-Unis.
Il devrait aussi entraîner le levée des taxes punitives américaines imposées depuis plusieurs mois sur l'acier et l'aluminium européens.
Les discussions ont très peu avancé depuis juillet, entre des Américains concentrés sur un autre front commercial face à la Chine, et des Européens plutôt satisfaits du fragile équilibre avec Washington.
Mais la remise dimanche dernier à Donald Trump d'un rapport de son ministère du Commerce sur l'industrie automobile, au contenu toujours confidentiel, a remis l'UE sous pression.
La Commission a prévenu qu'elle riposterait de "manière rapide" à d'éventuels droits de douanes punitifs de Washington.
Une liste de biens américains susceptibles d'être taxés en rétorsion, à hauteur de 20 milliards d'euros, est prête à sortir de ses tiroirs.
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