L'alcool est responsable de 7% des décès de personnes adultes survenus en 2015, estime l'organisme public, un chiffre en légère baisse par rapport aux estimations précédentes mais qui en fait toujours la deuxième cause de mortalité évitable après le tabac (78.000 décès par an).
C'est une "hécatombe", déplore le psychiatre spécialiste des addictions Amine Benyamina, qui critique sur Twitter "l'insuffisance des mesures" prises par le gouvernement.
"Combien de morts faut-il attendre avant la mise en oeuvre d'une politique de réduction des risques réellement efficace ?", renchérit dans un communiqué l'Association nationale de prévention en alcoologie et addictologie (ANPAA).
La publication début janvier du plan gouvernemental contre les addictions avait suscité des réactions mitigées des spécialistes regrettant l'absence de mesures concrètes pour lutter contre ce fléau, telles que l'augmentation du prix de l'alcool.
Puis le ministre de l'Agriculture Didier Guillaume avait estimé que le vin n'était "pas un alcool comme les autres", déclenchant l'indignation des médecins addictologues. La ministre de la Santé Agnès Buzyn avait appelé à ne "pas banaliser la consommation d'alcool".
En 2009, 49.000 décès étaient dus à l'alcool, soit 9% du total.
Cette baisse "s'explique en grande partie par la diminution de la mortalité pour les causes liées à l'alcool" (notamment parce qu'on sait mieux soigner les maladies qu'il provoque), plus que par la légère baisse de la consommation, passée de 27 à 26 g d'alcool pur par jour entre 2009 et 2015, expliquent les auteurs de l'article, publié dans le bulletin épidémiologique hebdomadaire (BEH) de l'organisme public.
Le bilan est beaucoup plus lourd chez les hommes, pour lesquels l'alcool est à l'origine de plus d'un décès sur 10 (11%), contre 4% chez les femmes.
La France fait moins bien que les pays voisins: en Ecosse, l'alcool causerait ainsi 6,8% des décès chez les hommes et 3,3% chez les femmes, en Suisse, 5% et 1,4% respectivement, et en Italie, 3% et 2%.
L'étude, menée par un biostatisticien et une épidémiologiste, se base sur les consommations déclarées par un échantillon de 20.000 personnes et sur les chiffres de vente d'alcool, les enquêtes déclaratives tendant à minimiser le nombre de verres pris.
Ils ont ensuite recoupé ces chiffres avec l'ensemble des causes de mortalité pour lesquelles l'alcool modifie le risque.
"Effets délétères"
Le cancer ressort ainsi largement en tête, avec 16.000 décès, devant les maladies cardiovasculaires (9.900), les maladies digestives (6.800) et les accidents et suicides (5.400).
La très grande majorité de ces décès (90%) "sont liés à des consommations supérieures à 53 g par jour" d'alcool pur, soit plus de 5 unités d'alcool.
Ces chiffres plaident pour inciter la population à réduire sa consommation moyenne, de 2,6 verres par adulte et par jour en 2015, pour "l'abaisser à moins de 10 verres par semaine, dose qu'il est recommandé de ne pas dépasser", concluent les auteurs.
D'autant que la consommation moyenne des Français ne baisse plus sur une période plus récente, montre une autre étude de la même publication: elle était en 2017 de 11,7 litres d'alcool pur par habitant de plus de 15 ans, soit le même niveau qu'en 2013.
Cette moyenne présente de grandes disparités : 10% des 18-75 ans boivent à eux seuls 58% de l'alcool consommé en France.
Cela doit inciter à cibler les politiques de santé sur les gros buveurs, juge Michel Reynaud, président du Fonds Actions Addictions, car les dommages "croissent de façon exponentielle selon les quantités".
Dans un commentaire publié sur le site The Conversation, le médecin fustige "le modèle économique des alcooliers", "bâti sur les consommations excessives" alors qu'ils "prétendent prôner une consommation modérée".
Toutefois, "même à la dose relativement modérée de moins de 18 g d'alcool pur consommé par jour (moins de deux verres standards) (...) le risque global est augmenté", rappelle Santé publique France.
"Les minimes et très sélectifs effets protecteurs de l'alcool sont réduits à néant par ses effets délétères", insiste dans un éditorial François Bourdillon, directeur général de l'organisme public.
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