"Moncloa (le palais où siège le chef du gouvernement) a dit que l'on annoncerait vendredi la convocation d'élections" anticipées, a déclaré jeudi à la radio la ministre du Budget, Maria Jesus Montero.
Le gouvernement a fait ensuite savoir que M. Sanchez, en poste depuis à peine huit mois, s'exprimerait vendredi à 10H00 (09H00 GMT) à l'issue d'un conseil des ministres extraordinaire.
Le socialiste, à la tête du gouvernement le plus minoritaire de l'histoire espagnole, n'aura donc pas réussi à maintenir la fragile majorité formée par les socialistes, la gauche radicale, les indépendantistes catalans et les nationalistes basques, qui lui avait permis de renverser le 1er juin son prédécesseur conservateur, Mariano Rajoy.
Les séparatistes catalans, qui avaient soutenu la motion de censure l'ayant porté au pouvoir, ont en effet rejeté mercredi au Parlement, avec la droite, son projet de loi de finances au lendemain de l'ouverture à Madrid du procès de la tentative de sécession de la Catalogne de 2017.
Le dialogue entre gouvernement et indépendantistes a été rompu la semaine dernière, ces derniers continuant à réclamer un référendum d'autodétermination, inacceptable pour Madrid.
Campagne
Le discours-fleuve à la chambre des députés de Maria Jesus Montero mercredi, pour défendre un budget qu'elle savait voué à l'échec, avait déjà de forts accents de campagne électorale.
Le gouvernement, qui est le plus féminin de l'histoire espagnole, a transmis par ailleurs à la presse un document vantant le bilan de sa courte action: augmentation de 22% du salaire minimum, financement de mesures contre les violences faites aux femmes...
Reste à savoir désormais la date du scrutin.
"La question est quand (...) En 2019, c'est sûr (...) Seul le président (du gouvernement) connaît la date", a souligné jeudi la ministre du Budget alors que le 28 avril ou le 26 mai - date des élections européennes, municipales et régionales - ont été évoqués.
Chaque option a ses avantages et ses inconvénients, estime la chercheuse en sciences politiques Berta Barbet, pour qui Pedro Sanchez, dont le mandat court en théorie jusqu'en juin 2020, devra tenter de minimiser l'impact d'un possible vote-sanction.
'Législature mouvementée'
Car le socialiste est attaqué frontalement sur la question catalane par le Parti populaire (PP), les libéraux de Ciudadanos et le parti d'extrême droite Vox qui ont organisé dimanche dernier une grande manifestation pour réclamer des élections.
Selon plusieurs sondages, ces trois formations seraient en mesure de former une majorité ensemble au niveau national, comme elles l'ont fait en janvier en Andalousie (sud) pour chasser les socialistes de leur fief historique.
Pedro Sanchez "pense qu'avec le temps, cette menace (de la droite et de l'extrême droite) ne fera qu'empirer. Parce que l'action de son gouvernement va s'éroder, il ne pourra pas faire les politiques qui contenteraient son électorat, faute de budget", explique Berta Barbet.
La convocation d'élections va "représenter la fin d'une législature atypique, mouvementée", entamée en 2016, assure pour sa part à l'AFP Paloma Roman, politologue à l'université Complutense de Madrid.
Car en moins de quatre ans, le bipartisme a volé en éclats, la Catalogne a tenté de faire sécession, un chef du gouvernement, Mariano Rajoy, a été renversé pour la première fois en quarante ans par un adversaire, Pedro Sanchez, pourtant battu dans les urnes.
Et des élections pourraient ne rien résoudre.
Avec l'irruption de Vox, la chambre des députés pourrait battre un nouveau record de partis représentés.
Et les indépendantistes, toujours au pouvoir en Catalogne et furieux du procès en cours à Madrid, seront des moins enclins à négocier.
Pour Steven Trypsteen, analyste chez ING, une majorité Ciudadanos-PP-Vox risque d'augmenter "les tensions entre le gouvernement central et la Catalogne". Et si les voix des nationalistes basques et catalans sont indispensables pour gouverner, c'est un nouveau "blocage politique" qui s'annonce.
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