Dans ce texte le patronat, désireux de "faire du retour durable à l'emploi une priorité", avance une dizaine de propositions sur l'épineuse question de l'explosion des contrats courts (CDD de moins d'un mois).
Sans surprise, il ne propose pas d'appliquer un "bonus-malus" sur les cotisations chômage des employeurs en fonction de leur recours aux contrats précaires comme le réclament les syndicats en s'appuyant sur l'engagement en ce sens d'Emmanuel Macron.
A la place, le patronat veut revoir les règles des "CDD d'usage", des CDD dérogatoires sans limitation de renouvellement ni versement d'indemnité de fin de contrat. Ils se sont très largement développés sans contrôle dans l'hôtellerie-restauration, le spectacle, les services à la personne... Un rapport de l'Inspection générale des affaires sociales pointait en 2016 une "dérive".
La principale concession patronale serait que l'employeur verserait au salarié une prime "égale à …% de la rémunération totale brute versée, dès lors que ce dernier a bénéficié d'au moins 4 CDD d'usage au cours des 6 derniers mois". Son montant est donc ouvert à la négociation. Les CDD classiques ont eux une "prime de précarité" de 10%.
"On fait une proposition alternative au +bonus-malus+ dont on pense que c'est un destructeur d'emplois", a commenté jeudi matin le patron du Medef, Geoffroy Roux de Bézieux, défendant son projet comme une "manière de reconnaître" que les contrats courts "ont besoin d'exister mais aussi qu'on doit compenser le statut de ces salariés".
Mais le secrétaire général de la CFDT, Laurent Berger, sur lequel mise le patronat pour avoir un accord, a lui jugé "pas satisfaisant" ce "système" fondé sur une "prime de précarité" qui "n'est pas chiffrée".
Si la proposition du Medef n'évolue pas, "il faudra qu'on assume qu'il n'y a pas d'accord possible avec le patronat", a-t-il prévenu.
A leur arrivée au siège du Medef, les négociateurs syndicaux n'ont pas caché leur déception sur "des mesurettes".
"Il n'y a aucune mesure pour créer des CDI", a déploré Denis Gravouil (CGT). "La proposition patronale est totalement indigente", a renchéri Jean-François Foucard (CFE-CGC). "Ce n'est pas à la hauteur d'un +bonus-malus+" pour Michel Beaugas (FO).
Un milliard d'économies
Le Medef, la CPME (petites et moyennes entreprises) et l'U2P (artisans et commerçants) avaient été fortement irrités fin janvier par Emmanuel Macron, qui avait répété sa "détermination" à mettre en place ce "bonus-malus". Les trois organisations s'étaient brièvement retirées des négociations avant d'être rassurées par des déclarations d'Édouard Philippe sur sa "confiance" dans les partenaires sociaux.
"S'il y a une mesure aussi forte et efficace (que le "bonus-malus"), on n'est pas fermés", a déclaré la ministre du Travail Muriel Pénicaud.
Dans ses autres mesures pour "améliorer la situation des personnes en contrats courts récurrents", le patronat propose de donner aux CDD de moins de trois mois l'accès à la complémentaire santé de leur entreprise ou de renforcer l'abondement de leur compte personnel formation. Il suggère également de développer les groupements d'employeurs qui "partagent" un salarié en CDI.
Sur l'autre sujet conflictuel, les économies (entre 1 et 1,3 milliard d'euros par an) demandées par le gouvernement pour réduire l'endettement de l'Unedic (35 milliards), les propositions patronales pour s'en approcher risquent aussi de faire tiquer les syndicats qui ne veulent pas "pénaliser les demandeurs d'emploi".
Durcissement de l'accès à l'indemnisation, évolution du mode de calcul de l'allocation et de ses modalités de versement... Le patronat cherche à éviter que "le fractionnement" des contrats de travail "soit plus intéressant, tant pour le salarié que l'employeur, que l'allongement des durées d'emploi".
Dans cette partie de poker, l'intérêt commun des partenaires sociaux pourrait être de trouver un compromis pour préserver la gestion paritaire de l'assurance chômage. En cas d'échec, le gouvernement pourrait en effet imposer ses vues par décret.
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