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Juppé abandonne le "combat politique" : "l'envie me quitte"

"L'envie me quitte tant le contexte change": Alain Juppé a expliqué jeudi, des sanglots dans la voix, qu'il quittait la mairie de Bordeaux et le "combat politique" pour le Conseil Constitutionnel, parce que "l'esprit public est devenu délétère".

Juppé abandonne le "combat politique" : "l'envie me quitte"
Alain Juppé lors de sa conférence de presse à Bordeaux le 14 février 2019 - GEORGES GOBET [AFP]

L'ex-Premier ministre de 73 ans, qui a accepté mercredi de rejoindre l'assemblée des Sages, a dit devant la presse et son équipe municipale venue en nombre, pourquoi, à la surprise générale de la capitale girondine, il allait quitter l'Hôtel de Ville. Une décision qui est "pour moi un crève-coeur".

M. Juppé, qui voit sa ville défigurée chaque samedi par les débordements lors des manifestations des "gilets jaunes", a dénoncé "la montée de la violence sous toutes ses formes, verbales et physiques, le discrédit des hommes et des femmes politiques réputés +tous pourris+, la stigmatisation des élites dont tout pays a pourtant besoin (...) dans ce climat général infecté par les mensonges et les haines que véhiculent les réseaux sociaux".

"L'esprit public, la vie publique sont difficiles à vivre et lourdes à porter (...) Aujourd'hui, aucune fonction n'inspire plus le respect à nos concitoyens, il faut agresser, il faut insulter, systématiquement", a dénoncé Alain Juppé, qui a pour autant nié avoir pris sa décision en raison du mouvement des "gilets jaunes", dont sa ville est un des bastions.

"Il n'y a aucun lien de cause à effet entre ces manifestations et ma décision, naturellement. Ce que j'ai voulu évoquer, c'est plus un climat général, c'est cette dégradation de l'esprit public", a insisté celui qui s'est revendiqué à plusieurs reprises de "l'ancien monde".

M. Juppé, qui a dû "se décider en 24 heures" après la proposition de président de l'Assemblée nationale Richard Ferrand, a donné "deux raisons" pour l'avoir acceptée : la volonté "de ne pas faire le mandat de trop" et "le besoin de renouvellement qui monte ici et là. Le temps est venu de nouveaux visages et de nouvelles équipes", a-t-il lancé.

"Place à la relève"

Celui qui fut maire de Bordeaux pendant près de 25 ans a expliqué qu'il se refusait à "désigner un dauphin". "Nous ne sommes pas en monarchie", a-t-il ajouté. "Je ne jouerai pas à la statue du commandeur. Place maintenant à la relève".

Celui qui est aussi président de Bordeaux Métropole a précisé qu'il réunirait "cette semaine" les élus de sa majorité et "c'est collectivement que nous choisirons celui ou celle qui se présentera ensuite aux suffrages" des conseils municipaux et métropolitains.

Les élus locaux mentionnaient les noms de son adjoint chargé des finances, Nicolas Florian (LR), 50 ans, pour la mairie "un nom qui fait consensus"- et de Patrick Bobet, le maire LR du Bouscat, en banlieue, pour la présidence de Bordeaux Métropole.

Les sanglots dans la voix, et longuement applaudi, Alain Juppé a assuré qu'il "n'avait pas pris sa décision de gaité de coeur". "Avec Bordeaux et avec son peuple, nous sommes en quelque sorte un vieux couple. C'est un arrachement de me séparer de qui j'ai tant aimé, à qui j'ai tant donné et qui m'a tant donné en retour".

"Je garderai en moi sa marque indélébile", a-t-il ajouté en précisant qu'il ne "quittait pas vraiment" Bordeaux où son épouse "Isabelle et moi y garderons notre résidence".

M. Juppé, qui succèdera à Lionel Jospin au Conseil constitutionnel, a précisé qu'il prendrait ses fonctions début mars et démissionnerait alors de tous ses mandats.

Aux commandes de la ville depuis 1995 - hormis une courte interruption après sa condamnation à 14 mois de prison avec sursis et un an d'inéligibilité pour "prise illégale d'intérêt" dans l'affaire des emplois fictifs du RPR - et toujours réélu au premier tour, M. Juppé est le maire qui a métamorphosé la "belle endormie" de ville noire et polluée en cité attractive.

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