Maurice Kamto, 64 ans, avocat de renom et ancien ministre, a été présenté avec 26 de ses partisans devant le tribunal militaire de Yaoundé qui, dans la nuit de mardi à mercredi, les a tous inculpés pour les mêmes motifs.
Cinq ont été libérés sous caution et 22, dont M. Kamto, ont été transférés à la prison centrale de Yaoundé, selon Olivier Bibou Nissack, porte-parole de l'opposant.
Théoriquement, M. Kamto et les autres inculpés peuvent encourir la peine de mort, légale au Cameroun mais qui n'a pas été appliquée depuis plus de trente ans.
Maurice Kamto est arrivé deuxième à la présidentielle d'octobre 2018 (14,23% des voix), loin derrière Paul Biya réélu pour un septième mandat consécutif (71,2% des suffrages). Il qualifie depuis la victoire du président sortant de "hold-up électoral" et a plusieurs fois appelé à des marches de protestation interdites par le pouvoir.
Depuis son arrestation le 28 janvier dans la capitale économique Douala, Maurice Kamto était en garde à vue dans les locaux d'une unité spéciale de la police à Yaoundé, le Groupement spécial d'opérations (GSO).
Le Mouvement pour la renaissance du Cameroun (MRC) de Maurice Kamto affirme que plus de 200 de ses partisans ont été arrêtés ces dernières semaines, en marge de manifestations contre la large réélection de Paul Biya, au pouvoir depuis 36 ans.
Selon les autorités, 147 personnes au total sont en détention provisoire, dans l'attente de leur présentation à un juge.
"Dictature"
"On s'enfonce dans la dictature", a commenté Philippe Manga, un responsable de la société civile camerounaise.
Maximilienne Ngo Mbe, directrice du Réseau des défenseurs des droits humains en Afrique centrale (Redhac), a demandé la libération de "tout ce monde-là": "Il faut que le Cameroun respecte ses engagements internationaux (...) relatifs aux libertés d'association, de manifestation, d'expression, d'opinion qui sont des libertés fondamentales."
La France, ancienne puissance coloniale, s'est dite "préoccupée" par la "situation de M. Kamto et celle d'environ 200 de ses partisans qui sont détenus". Elle a insisté sur la nécessité pour l'opposition de "pouvoir s'exprimer librement".
Tous les partisans de M. Kamto ont été arrêtés fin janvier en marge de manifestations dans plusieurs villes du pays, dont Yaoundé et Douala.
Plusieurs de ces marches avaient été réprimées par la police et au moins six manifestants blessés: début février, l'Union européenne (UE) avait dénoncé un "usage disproportionné de la force par les forces de sécurité".
Depuis l'annonce des résultats de la présidentielle, Maurice Kamto a plusieurs fois appelé à marcher contre la réélection de M. Biya, réunissant à chaque fois une base solide de militants dans la rue.
Après son arrestation, dans un souci d'apaisement, son parti avait décidé d'annuler d'autres marches interdites.
Depuis son arrestation à Douala, ses avocats ont martelé que sa détention était "illégale", sa garde à vue à Yaoundé ne lui ayant pas été notifiée.
"Entêté politique"
Mardi, ils ont à nouveau indiqué que leur client et plusieurs autres militants en garde à vue au GSO étaient "privés du droit de visite et d'assistance de leurs avocats".
Gardés à vue aux côtés de M. Kamto, figurent plusieurs personnalités qui lui sont proches, dont Paul-Eric Kingue, son ex-directeur de campagne, ou Valsero, rappeur réputé au Cameroun.
Depuis l'arrivée au pouvoir de Paul Biya en 1982, l'opposition avait toujours été incarnée par le Social Democratic Front (SDF) de Ni John Fru Ndi, jusqu'à la montée en puissance de Maurice Kamto à la dernière présidentielle.
Il est désormais considéré comme le principal opposant à Paul Biya, qui fête mercredi ses 86 ans.
"Il y a longtemps que le Cameroun n'avait pas eu un opposant de cette envergure", a déclaré à l'AFP Hans de Marie Heungoup, analyste au centre d'analyse politique International Crisis Group (ICG).
"Celui que même certains opposants décrivaient comme mollasson à ses débuts se révèle finalement être un véritable entêté politique", a-t-il ajouté.
Depuis 1982, Paul Biya règne en maître absolu au Cameroun, où il a tout verrouillé pour assurer son maintien à la tête du pays, s'appuyant sur l'administration et sur un parti-Etat, le Rassemblement démocratique du peuple camerounais (RDPC), qu'il a créé en 1985.
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