Les "sages" ont estimé qu'"en privant le proxénétisme de sources de profits", le législateur avait entendu "lutter contre cette activité et contre la traite des êtres humains aux fins d'exploitation sexuelle, activités criminelles fondées sur la contrainte et l'asservissement".
Le législateur "a ainsi entendu assurer la sauvegarde de la dignité de la personne humaine contre ces formes d'asservissement et poursuivi l'objectif de valeur constitutionnelle de sauvegarde de l'ordre public et de prévention des infractions", affirme le Conseil constitutionnel.
Neuf associations, dont Médecins du Monde et le Syndicat du travail sexuel (Strass), et une trentaine de travailleurs du sexe étaient à l'origine de cette question prioritaire de constitutionnalité (QPC) contre la loi qui prévoit une amende pouvant aller jusqu'à 1.500 euros et 3.750 euros en cas de récidive pour les clients.
Ce recours avait ravivé un débat déjà très âpre lors du vote de la loi, entre deux camps ayant pour objectif commun une meilleure protection des prostituées mais aux positions irréconciliables.
D'un coté, les requérants ont fustigé une loi qui réprime, "même entre adultes consentants", le recours à la prostitution, "méconnaît les droits constitutionnels à l'autonomie personnelle et à la liberté sexuelle, le droit au respect de la vie privée, la liberté contractuelle, la liberté d'entreprendre".
De l'autre, d'autres associations, dont le Mouvement du Nid, favorables à la nouvelle législation et qui estiment que "pénaliser est indispensable pour abolir la violence, car sans acheteur il n'y a pas de prostitution".
A peine la décision du Conseil constitutionnel tombée, les premiers ont fustigé "une mauvaise décision, dangereuse pour la santé et les droits des travailleuses du sexe", les seconds se réjouissant de voir "la loi abolitionniste confortée".
A l'audience du 22 janvier, l'avocat des requérants Patrice Spinosi avait critiqué "le caractère schizophrénique" de la situation actuelle: la pénalisation de clients de travailleurs du sexe exerçant, eux, une activité licite. Et pointé la part d'hypocrisie du législateur, qui "aurait dû interdire la prostitution" s'il voulait "interdire tout recours à la prostitution".
Au quotidien, la pénalisation des clients a, selon les associations qui attaquent la loi, fait baisser les revenus des travailleurs du sexe et les a obligés à accepter des rapports non protégés ou à exercer dans des endroits plus isolés, à l'écart de la police et où ils sont davantage exposés aux agressions.
Au contraire, pour les défenseurs du texte, "abroger la pénalisation du client, ce serait favoriser la loi du plus fort" et la liberté doit être pensée comme "un principe de protection".
Un argument entendu par Conseil constitutionnel, qui a clairement tranché: "Si le législateur a réprimé tout recours à la prostitution, y compris lorsque les actes sexuels se présentent comme accomplis librement entre adultes consentants dans un espace privé, il a considéré que, dans leur très grande majorité, les personnes qui se livrent à la prostitution sont victimes du proxénétisme et de la traite et que ces infractions sont rendues possibles par l'existence d'une demande de relations sexuelles tarifées".
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