Rouen (Seine-Maritime) et son canard au sang, ses trois chefs étoilés, sa fête du ventre ou encore son salon gourmand. Autant d'arguments parmi d'autres pour prétendre au label "ville créative" de l'Unesco. Il a été créé en 2004 pour promouvoir la coopération à l'international entre les villes qui estiment que la créativité est un facteur stratégique du développement urbain durable. Le label existe notamment pour la littérature ou la musique. Rouen a choisi plutôt la gastronomie. Et pour Bruno Bertheuil, l'adjoint au commerce à l'origine de la proposition, cela va bien au-delà des grands restaurants et de l'aspect patrimonial de la chose. "On peut mettre en avant notre restauration collective à Rouen. Nos cantines travaillent depuis longtemps avec des produits bios et en circuit court pour 6000 à 7000 personnes par jour", souligne-t-il. Car l'élu le sait, pour s'y être intéressé, il faut, pour obtenir le label apporter quelque chose de neuf au réseau, d'original et de spécifique à Rouen. "Dans une démarche Unesco, le chemin est aussi important que le résultat. Le dossier que l'on proposera sera le résultat de la consultation de tous les acteurs", précise-t-il. Une consultation qui doit être lancée à l'automne avec l'organisation d'un grand colloque réunissant tous ceux qui gravitent autour de la gastronomie : les restaurateurs, les producteurs, les médecins nutritionnistes, le Marché d'intérêt national (MIN) mais aussi les villes jumelles de Rouen qui ont déjà un label "ville créative" et qui pourront témoigner de leur démarche, c'est-à-dire Norwich, pour la littérature et Hanovre pour la musique.
Proximité, santé, transmission
Le contenu du dossier final reste encore flou mais Bruno Bertheuil a déjà bien en tête les axes de travail qu'il souhaite voir mis en avant lors du colloque : la proximité avec le circuit court et les produits d'exception locaux, la santé avec la nutrition et notamment les travaux du docteur Pierre Déchelotte, spécialiste des troubles alimentaires et enfin la transmission et la formation avec la présence de l'institut national de la boulangerie pâtissier, les CFA de la métropole ou encore le lycée hôtelier Georges Baptiste de Canteleu.
La préparation du canard à la presse et de sa sauce au sang est très codifiée. - Ordre des canardiers
L'ordre des canardiers de Rouen aura sans aucun doute son rôle à jouer dans cette démarche. Il a justement été créé pour cela : sauvegarder le patrimoine culinaire avec la recette du canard au sang et assurer sa transmission. Son président actuel, Patrice Thomas, assume d'ailleurs un vrai rôle de lobbyiste. "Notre travail est de promouvoir le canard, au salon de l'agriculture à Paris, au salon gourmand… On va aussi dans les lycées hôteliers pour pousser à ce que l'on apprenne aux élèves notre recette traditionnelle", explique le passionné avant d'ajouter que "le canard à la presse à la rouennaise est même servi au Japon", grâce à leur travail de promotion.
Philippe Molinié, le chef du restaurant Chez Philippe, est lui aussi maître canardier. Lui a mis son savoir-faire et sa passion au service de l'insertion. En plus de son restaurant, il donne des cours de cuisine avec l'association Team qui œuvre pour les personnes en situation de handicap mental. Le mercredi, il apprend les bases à des personnes atteintes de trisomie 21. "Tous les ans, je me dis que je vais arrêter mais c'est impossible, explique le chef plein de bienveillance. Ils apportent tellement. Ce sont mes loulous, mon havre de paix", détaille-t-il en montrant des selfies pris lors des leçons sur son téléphone. La cuisine et la gastronomie deviennent alors un moyen de se sentir inclus dans la société. Un aspect à mettre en avant dans la démarche Unesco. "C'est vrai qu'ils sont limités mais quand on leur apprend quelque chose, ils le font très très bien et cela leur permet de s'insérer", reprend le chef. Plusieurs ont d'ailleurs décroché des emplois dans des selfs ou des cafétérias, comme au CHU de Rouen. "Là, on se dit qu'on a fait du bon boulot."
Les démarches sont donc nombreuses, diverses et variées. Reste à leur donner une cohérence et un but commun : celui de pouvoir dire que Rouen est reconnu à l'Unesco pour sa gastronomie.
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