"Le Testament de Justyna" (traduit du polonais par Urszula Hyzy - directrice du bureau de l'AFP à Tokyo - et Patrick Godfard, agrégé d'histoire) paraît alors que se déroule dimanche la Journée internationale à la mémoire des victimes de l'Holocauste.
Le livre, édité par la maison d'édition Le Bord de l'eau, a été écrit par Gusta (diminutif d'Augusta) Dawidson Draenger, jeune résistante juive polonaise, alors qu'elle se trouvait en prison entre janvier et avril 1943. "Justyna" était le pseudonyme de Gusta dans la Résistance.
Sorti en polonais en 1946, traduit en anglais, en allemand et en hébreu, le livre n'avait jamais été traduit en français.
Ce récit constitue un formidable témoignage de première main sur l'action méconnue d'un groupe de résistants juifs du ghetto de Cracovie. Ce groupe nommé "le pionnier combattant" était rattaché à l'Organisation juive de combat et mena plusieurs actions spectaculaires contre l'occupant: faux papiers, déraillements de trains, assassinats de soldats allemands ou de délateurs, attaques à main armée en plein cœur de la ville (celle du 22 décembre 1942 provoqua la mort de douze soldats allemands).
Le groupe a compté près de 160 membres (le plus jeune avait 15 ans et le plus "âgé" 30 ans).
Les femmes "fer de lance"
Le réseau fut vite démantelé. Quelques-uns réussirent toutefois à échapper à la Gestapo. Ils continuèrent à lutter soit en intégrant des unités de partisans dans les forêts, soit en participant au soulèvement du ghetto de Varsovie.
À la fin de la guerre, seuls 22 membres du réseau de Gusta Draenger étaient encore vivants.
Le texte, aux qualités littéraires indéniables, illustre aussi une poignante histoire d'amour entre Gusta Draenger et son mari Szymon. Après l'arrestation de Szymon au début de l'année 1943, Gusta décida de se rendre à la Gestapo pour partager son sort. Ce fut à ce moment-là qu'elle se mit à écrire pour que leurs actions, selon ses propres mots, "fussent inscrites dans le grand Livre de la Mémoire".
"Il fallait témoigner de tout cela", écrit Serge Klarsfeld qui signe la préface du livre. "Gusta était prisonnière, mais avec l'aide de ses codétenues, elle est parvenue, sur des feuilles de papier hygiénique, à reconstituer le parcours de cette Résistance et à redonner vie aux personnalités qui en furent les protagonistes, à décrire leurs états d'âme et leurs sensibilités", écrit-il.
Le livre démontre également, fait remarquer Serge Klarsfeld, que "dans la résistance juive à la volonté exterminatrice des nazis, les hommes n'ont pas été seuls mais que souvent les femmes ont été un fer de lance..."
"Le Testament de Justyna" fut écrit (dans des conditions épouvantables) grâce à une chaîne de solidarité entre détenues juives et non juives. Ce sont des prisonnières polonaises non juives qui donnent à Gusta de quoi écrire. Un système de copies est mis en œuvre. Quatre copies sont élaborées. Deux sont cachées en lieu sûr, à l'intérieur du poêle inusité et dans la doublure de la tapisserie de la porte de la cellule, deux autres sont passées clandestinement à un groupe de travailleurs juifs qui réparent les voitures de la Gestapo.
Le manuscrit de Gusta Draenger (la copie camouflée dans la porte de la cellule) se trouve aujourd'hui à la Maison des combattants des ghettos en Israël. Un quart de l'original a été perdu.
Au printemps 1943, Gusta et son mari parviennent à s'évader de leur prison, chacun de son côté, à l'occasion d'un transfert. Szymon est repris en novembre. Comme au début de l'année 1943, Gusta se rend aux SS. Tous les deux seront exécutés.
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