Ce n'était pas officiellement prévu au programme de l'Elysée. Après une journée marathon dans la Drôme avec un déjeuner d'au moins 2H30 avec une soixantaine d'élus à Valence et la visite d'un Ehpad, il est arrivé vers 18H00 à la salle François Mitterrand de cette petite commune de 10.500 habitants, fief de son ministre de l'Agriculture, Didier Guillaume.
"Pardon de m'inviter au dernier moment", a-t-il lancé. Les forces de l'ordre, à cran, s'attelaient au dernier moment à sécuriser à la zone tout en filtrant les quelque 250 personnes inscrites au débat, dont une poignée vêtues de gilets jaunes.
Le président debout, micro en main, a répondu pendant 3H15, n'éludant aucun sujet: l'ISF, l'école, le glyphosate, l'emploi et même des sujets techniques ou plus insolites comme la cybersécurité ou les courses hippiques.
Auparavant, à la sortie du déjeuner-débat de Valence, la plupart des élus, à commencer par le patron des Républicains Laurent Wauquiez, avaient exhorté Emmanuel Macron à aller "au contact" des Français. "A portée d'engueulade", prônait même Jean-François Débat, maire PS de Bourg-en-Bresse.
Mais les échanges n'ont pas été si musclés. Il a parfois été applaudi et la parole a été distribuée dans la bonne humeur par l'hôtesse de la soirée, la maire PS de Bourg-de-Péage, Nathalie Nieson. Toutefois, comme à son habitude, le président est resté ferme face aux critiques.
"Est-ce qu'il y a deux ans, quand il y avait l'ISF, on vivait mieux et il y avait moins de SDF ? Non, je ne l'ai pas fait pour faire un cadeau à des gens". "Ben si", répond en coeur l'assemblée. "Non, c'est pas vrai", rétorque Emmanuel Macron.
Retraités, chefs d'entreprise
Puis arrive le sujet des banques, un homme d'une cinquantaine d'année lit fébrilement sa question. Et, face à une salle qui bruisse, le président revient sur l'image de banquier qui lui colle à la peau sur les ronds-points.
"Vous savez, je suis pas un héritier moi, je suis né à Amiens (...) Si j'étais né banquier d'affaires, vous pourriez me faire la leçon. Si j'étais né avec une petite cuillère dans la bouche ou fils de politiciens, vous pourriez me faire la leçon. Ce n'est pas le cas".
Dans la salle, beaucoup de retraités, de chefs d'entreprise. Certains impressionnés comme cette ancienne institutrice en "Zep" qui "ne s'attendait pas du tout à rencontrer (le président) aujourd'hui".
"Toute ma vie j'ai rêvé d'un cours préparatoire à 15 élèves", commence-t-elle, "ravie" que les classes de CP soient désormais limitées à 12 élèves en "Zep". Et de lancer, trémolos dans la voix: "les +gilets jaunes+ mais bonté, qu'est-ce qu'on a loupé" pour en arriver là.
"On a assigné des gens à résidence", a reconnu Emmanuel Macron. Et "le seul moyen de le corriger, c'est d'abord l'école", opine-t-il. "Ce que vous avez dit avec beaucoup d'émotion était bouleversant", ajoute-t-il, estimant que l'enseignement était "le plus beau métier avec les soignants".
"Ma vie personnelle est émaillée" d'enseignants, a-t-il lancé dans une allusion à son épouse, déclenchant les rires de la salle.
Au premier rang, Didier Guillaume, Emmanuelle Wargon, secrétaire d'État à la Transition écologique, un retraité qui boit la parole présidentielle, ou une dame au béret qui mâche frénétiquement un chewing-gum. Derrière elle, une personne handicapée interpelle Emmanuel Macron sur son cas personnel. A ses côtés, un "gilet jaune" arborant un bandeau jaune et des lunettes de soleil sur la tête.
"On peut pas dire qu'il m'a convaincu mais on sent que dans ses réponses, il fait sincère. Mais quand il parle de l'Europe, là ça fait un peu meeting", commentait après les échanges un des rares "gilet jaune" présents.
A 21H15, Emmanuel Macron a conclu les débats, s'attardant quelques minutes avec des citoyens et promettant déjà des "mesures très concrètes à l'issue du débat".
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