L'aiguille du baromètre, qui était remontée début 2018, rechute: la confiance des Français dans les médias atteint son plus bas niveau depuis le premier sondage, en 1987, selon cette étude dévoilée jeudi, réalisée début janvier par l'institut Kantar Sofres auprès d'un millier de personnes.
La télévision, média préféré des Français pour s'informer, recueille paradoxalement un niveau de confiance de seulement 38% (-10 points en un an). La radio, le média auquel ils font traditionnellement le plus confiance, en recueille 50% (-6 points).
La presse écrite s'effondre aussi à 44% (-8 points), tandis que la confiance des Français dans les informations trouvées sur internet reste à un niveau très bas (25%), proche des niveaux observés en 2005 et 2006.
Autre signe de défiance: près de trois-quarts des sondés jugent toujours que les journalistes ne sont indépendants ni du pouvoir politique ni des pressions de l'argent.
Les jeunes boudent l'actualité
"Ce sondage fait apparaître un grand esprit critique", a résumé le directeur de La Croix, Guillaume Goubert, lors d'une table ronde pour analyser ces résultats organisée mercredi. "Ça nous dérange, ça nous secoue, mais ce n'est pas une mauvaise nouvelle."
Car paradoxalement, s'ils s'en méfient de plus en plus, les Français s'intéressent aussi de plus en plus à l'information. Après un pic enregistré à la suite des attentats de 2015, l'int
érêt porté à l'actualité avait chuté dramatiquement. Il remonte début 2019, en plein mouvement des "gilets jaunes".
Les deux-tiers (67%) des personnes interrogées déclarent "suivre les nouvelles avec grand intérêt", contre 62% en 2018.
L'institut Kantar constate cependant une double fracture, générationnelle et sociale: d'un côté, 74% des plus de 65 ans témoignent d'une appétence moyenne voire grande pour l'actualité; de l'autre, moins de la moitié des 15-24 ans s'intéresse à l'actualité (50%), tout comme les moins diplômés (51%).
Alors que les "gilets jaunes" occupent la une de l'actualité depuis novembre, seul un tiers des Français interrogés se déclarent satisfaits de la couverture médiatique de cet inédit mouvement de contestation. Près de la moitié la juge mauvaise. Les sondés reprochent notamment aux médias en général d'avoir "dramatisé les évènements" (67%) et laissé trop de place "à des gens qui expriment un point de vue extrême" (52%).
Il faut transformer ces constats en "opportunités", pour Céline Pigalle, directrice de la rédaction de BFMTV, la chaîne d'information la plus regardée en France, prise pour cible par des "gilets jaunes" ces dernières semaines.
Après une réflexion sur "la place de l'image", la mise en valeur des reportages ou la façon dont la direction de la chaîne pourrait répondre aux interrogations des téléspectateurs, Céline Pigalle annonce des changements visibles à l'antenne de BFMTV "dans les prochains mois".
Facebook devance la presse
A l'occasion de la crise des "gilets jaunes", les habitudes des Français ont évolué: pour s'informer sur ce sujet, les Français ont privilégié dans l'ordre les JT des grandes chaînes, la radio, les chaînes d'info en continu mais aussi Facebook, devant les grands titres de la presse quotidienne ou les grands sites d'information sur internet.
Globalement, concernant l'actualité de l'année 2018, les Français considèrent par ailleurs que les médias ont "trop parlé" du litige sur l'héritage de Johnny Hallyday, de "l'affaire Benalla", mais aussi de la victoire française à la Coupe du monde de football.
Ils regrettent au contraire que les médias n'aient pas assez parlé de la Marche pour le climat à l'automne, des affaires de pédophilie dans l'Eglise catholique et de la loi contre le harcèlement de rue.
"Bien s'informer, c'est comme bien manger", a souligné de son côté la journaliste Anne-Sophie Novel, qui vient de réaliser un documentaire sur cette défiance grandissante. "La révolution alimentaire qu'on a connu ces vingt dernières années, il va falloir s'y atteler pour l'information".
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