Selon un avis de l'Agence de sécurité sanitaire Anses publié mercredi, il n'existe "aucune donnée épidémiologique permettant de mettre en évidence une association entre des effets sanitaires et le port de couches". En clair, pas de preuve que les couches jetables portées par 95% des bébés de France soient néfastes.
Cet avis réclamé par le gouvernement en janvier 2017 après un article de 60 millions de consommateurs "ne met pas en évidence de danger grave et immédiat", résument aussi les ministères de la Santé, de l'Economie et de la Transition écologique dans un communiqué commun.
Malgré tout, "on ne peut pas exclure un risque (...) puisqu'on observe un dépassement des seuils sanitaires pour un certain nombre de substances", explique à l'AFP Gérard Lasfargues, directeur général délégué de l'Anses.
Il s'agit de deux parfums (butylphényl méthyle propional et hydroxyisohexyl 3-cyclohexène carboxaldéhyde), ainsi que de certains hydrocarbures aromatiques polycycliques (parfois cancérogènes), de dioxines ou de furanes.
Pour son évaluation, "la première" de ce type au niveau mondial sur les couches, l'Anses a utilisé les analyses du Service commun des laboratoires (qui dépend de la répression des fraudes DGCCRF) et de l'Institut national de la consommation (qui édite 60 millions de consommateurs).
Alors que l'industrie avait reproché à 60 millions de consommateurs de simplement constater la présence de substances chimiques, l'agence a ici évalué leur risque potentiel "dans des conditions d'usage réalistes".
"On calcule une quantité absorbée en fonction du temps de port de couche, du nombre de couches portées par les bébés, jusqu'à 36 mois, et on compare à des valeurs toxicologiques de référence pour chacune des substances", explique Gérard Lasfargues, précisant qu'un bébé porte entre 3.800 et 4.800 couches.
Les fabricants veulent "rassurer"
Ainsi, certains pesticides comme le glyphosate, présents dans les analyses, ne sont pas dans la liste des substances à risque.
Mais pour celles qui dépassent les valeurs toxicologiques de référence, l'Anses recommande "de les éliminer ou de réduire au maximum leur présence".
Une recommandation immédiatement reprise par le gouvernement. "Les ministres exigent des fabricants et des distributeurs qu'ils prennent avant 15 jours des engagements pour éliminer ces substances des couches pour bébé", selon le communiqué commun.
Ils devront "prendre dans les meilleurs délais les mesures garantissant la sécurité des produits sur le marché", ajoutent les ministères, invitant dans l'immédiat les parents à se renseigner sur la composition des produits.
Première cible, les parfums, les seuls de ces produits chimiques à être intentionnellement ajoutés par les industriels.
Les fabricants, convoqués mercredi matin à Bercy, devront réévaluer "l'usage de certaines substances ajoutées intentionnellement".
Comme le suggère l'Anses, ils devront également mieux contrôler "la qualité des matières premières utilisées" qui peuvent être contaminées au préalable et modifier "les procédés de fabrication susceptibles d'être à l'origine de la formation de certaines substances".
D'autre part, la DGCCRF renforcera les contrôles en 2019 et la France plaidera à Bruxelles pour des règles européennes plus "protectrices".
Les couches jetables sont soumises dans l'UE à la règlementation générale sur les produits de consommation et non à des règles spécifiques comme certains produits cosmétiques ou les protections pour fuites urinaires.
Malgré cette alerte, le syndicat des fabricants de couche pour bébés a tenu à "rassurer tous les parents".
"Les consommateurs peuvent continuer à utiliser les couches proposées par les fabricants de Group'hygiène en toute sécurité", a assuré sa déléguée générale Valérie Pouillat dans un communiqué, s'engageant à "coopérer avec les autorités pour continuer à répondre aux attentes des consommateurs".
60 millions de consommateurs a de son côté salué les recommandations de l'Anses. Mais "il faudrait pour les bébés que ça ne traîne pas trop", a déclaré à l'AFP son rédacteur en chef adjoint Benjamin Douriez.
L'avis de l'Anses est basé sur des analyses de 23 couches "parmi les plus utilisées", mais il ne cite aucune marque, les données ayant été anonymisées, explique Gérald Lasfargues.
"La contamination concerne tous types de couches, y compris les couches dites écologiques", assure-t-il.
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