Le procès de ces attaques ayant visé la rédaction de Charlie Hebdo, une policière municipale et le supermarché Hyper Cacher, qui avaient fait 17 morts et sidéré en France et à l'étranger, pourrait avoir lieu en 2020 devant une cour spéciale uniquement composée de magistrats.
Ce serait le premier à se tenir pour un attentat commis en France depuis le procès en 2017 des tueries perpétrées par le jeune jihadiste Mohamed Merah cinq ans plus tôt.
Le 7 janvier 2015, les frères Chérif et Saïd Kouachi, des islamistes radicaux, avaient tué 12 personnes dans l'attaque du journal satirique Charlie Hebdo avant de prendre la fuite.
Le lendemain, Amédy Coulibaly avait tué une policière municipale à Montrouge (Hauts-de-Seine). Le 9 janvier, il avait ensuite tué quatre hommes, tous juifs, lors de la prise d'otages du magasin Hyper Cacher, dans l'Est parisien.
Il était mort sur place dans un assaut policier; les frères Kouachi avaient été abattus peu avant dans une imprimerie de Dammartin-en-Goële (Seine-et-Marne) où ils s'étaient retranchés. Cette issue mit un terme aux premiers attentats d'une vague jihadiste en France qui a fait au total 251 morts.
Sur les 14 accusés, qui peuvent encore faire appel de l'ordonnance signée jeudi par les juges, onze sont déjà aux mains de la justice française et trois sont visés par un mandat d'arrêt.
Les trois accusés visés par un mandat d'arrêt sont Hayat Boumedienne, compagne de Coulibaly, et les deux frères Belhoucine, partis quelques jours avant les attaques pour la zone irako-syrienne. Les deux hommes sont présumés morts.
Les magistrats du pôle antiterroriste du tribunal de Paris ont par ailleurs ordonné une disjonction pour poursuivre les investigations sur les soutiens des frères Kouachi, notamment au Yemen.
L'attaque jihadiste visant l'hebdomadaire satirique Charlie Hebdo a en effet été revendiquée du Yemen par Al-Qaïda dans la péninsule arabique (Aqpa), dont un cadre, Peter Cherif, a été arrêté le 16 décembre à Djibouti.
Ce proche des frères Kouachi, via la filière jihadiste des Buttes-Chaumont, a été remis dans la foulée à la France, où il a été mis en examen et est incarcéré.
"Il n'est pas exclu que celui des frères Kouachi s'étant rendu au Yemen en 2011 ait pu rencontrer sur place Peter Cherif", écrivent les juges Nathalie Poux, David de Pas et Emmanuelle Robinson dans cette ordonnance de 271 pages.
Un "complice" présumé sur le banc
Les juges retiennent les charges les plus lourdes contre l'aîné des frères Belhoucine, Mohamed, et contre Ali Riza Polat, un proche de Coulibaly pour sa part en détention en France.
Ils ordonnent leur procès pour "complicités des crimes" commis par les trois terroristes.
Mais seul Ali Riza Polat, 33 ans, sera vraisemblablement sur le banc des accusés. Son nom est inconnu du grand public, mais cet homme proche de Coulibaly, en détention depuis quatre ans, est mis en cause pour son rôle central dans les préparatifs des attentats, en particulier la fourniture de l'arsenal utilisé par le trio terroriste.
Ce Franco-Turc, qui s'était radicalisé en 2014, aurait en particulier effectué un transport d'armes de la ville belge de Charleroi vers Paris six mois avant les attentats et récupéré la moto utilisée par Coulibaly lors de l'assassinat d'une jeune policière à Montrouge.
"Il connaissait et partageait l'adhésion des auteurs principaux à l'idéologie du jihad armé et à l'organisation terroriste +État Islamique+", écrivent les juges, estimant qu'il avait "eu connaissance préalable de la nature terroriste des projets criminels en préparation".
Mohamed Belhoucine est, lui, soupçonné d'avoir apporté un soutien logistique et idéologique. Les enquêteurs ont établi qu'il est l'auteur du serment d'allégeance au groupe État islamique (EI) lu par Coulibaly dans une vidéo de revendication, et qu'il a pu jouer le rôle d'intermédiaire avec un commanditaire.
Trois autres suspects, qui avaient été mis en examen et un temps incarcéré, bénéficient pour leur part d'un non-lieu.
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